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Ensilage de maïs à l'ancienne
1968 : Jules, Bernard et Daniel agitateurs de révolution

Le 23 septembre prochain à partir de 14 h se tiendra à Chaulieu, aux confins de l’Orne, de la Manche et du Calvados, la fête de l’ensilage de maïs à l’ancienne. Clin d’œil dans le rétroviseur.

On les croirait tout juste sortis des "Vieux de la vieille", un film de Gilles Grangier avec Jean Gabin, porté sur les écrans en 1960. Plus de 240 ans en âges cumulés. Il y a Bernard, le facteur devenu entrepreneur de travaux agricoles qui préférait "ne pas savoir combien j’allais gagner le lendemain". Daniel, agriculteur à la base, qui s’est lancé parce que l’on est jamais mieux servi que par soi-même et Jules, poussé par Roger, son plus gros client de l’époque avec 2 ha. Bernard, Daniel et Jules sont des pionniers du maïs ensilage dans le Grand Ouest. C’étaient les années 1967/68 : la révolution agricole.Des anti-maïs aux anti-OGM
"Il y avait des anti-maïs à l’époque comme il y a des anti-OGM aujourd’hui". Jules Aunae se souvient de sa première ensileuse achetée en 1967. C’était une Fahr, un rang, traînée par un Ford 4000 de 54 cv. Et pourtant Jules ne voulait pas y rentrer dans les champs de maïs. Mais c’était sans compter sur la pression des développeurs de l’époque. Parmi eux : Roger, président du CETA (Centre d’Etudes Techniques Agricoles) local. Un gros client pour l’époque avec ses 2 ha à ensiler. Et puis, dans ce coin du bocage, on n’aime pas décevoir sa clientèle. Alors Jules y est allé : 50 ha dès la première année. Les parcelles étaient petites mais un chantier, c’était une journée de boulot. On détourait le champ à la faucille. Fallait pas gâcher ! Sur le silo taupinière, les femmes s’activaient avec le croc pour étaler le fourrage, leur époux sur le "petit gris" attelé au vibro.
Dix ans et trois autres ensileuses plus tard (deux Rivières traînées et une Hesston 4000 automotrice), Jules a définitivement raccroché ses becs, des souvenirs pleins la goulotte. Comme cet épisode de la boîte à outils oubliée dans une remorque et qu’on a retrouvé, des mois après, au fond du silo. Des souvenirs de casse aussi avec les trop nombreuses dents de pirouette qui se faisaient la belle dans les andains d’herbe. "Il n’ y avait pas de détecteur de ferraille", lâche-t-il. De ses machines et de ses chantiers, il en fait quelques films qui seront projetés à Chaulieu le 23 septembre prochain.Le facteur devenu ensileur
Bernard, c’est une autre histoire. Quelle mouche avait donc bien pu le piquer pour abandonner sa casquette de facteur et se visser sur la tête celle d’entrepreneur ? Du pur jus de révolutionnaire (...), c’était en 1968. Il a été le premier dans la région à acheter une ensileuse (John Deere 40 tirée par un John Deere 710) déboursant "1,8 million d’anciens francs(1). Le prix de trois voitures neuves. J’en ai pas dormi pendant 15 jours", en plaisante-t-il, 39 ans plus tard. Il est vrai que son marchand de matériels lui avait un brin forcé la main. "D’accord à condition que tu me trouves quarante ha à ensiler", avait-il concédé. Affaire conclue, contrat respecté de part et d’autre et du boulot en perspective. Il fallait à l’époque 3 heures pour ensiler un ha sans compter le temps passé à entretenir et réparer. "Les machines étaient fragiles", lâche-il. Enfin certaines plus que d’autres faisant allusion à sa première automotrice, une SF 80. Mais Bernard n’est pas rancunier. "Vous allez ensiler avec ma première machine !" s’est-il ému devant les organisateurs de la fête des ensilages d’antan. Tant pis pour l’ouverture de la chasse et la fête communale de son lieu de résidence. Il a fait son choix. C’est à Chaulieu qu’il sera le 23 septembre.Des saisons d’un mois et demi
18 millions d’anciens francs ! C’est aussi la somme qu’a investi Daniel dans sa première machine. "On facturait à l’époque 25 000(2) de l’heure". Et d’heures, il en a réalisé 450 sa première saison. Une saison qui s’étalait sur un mois et demi. Aujourd’hui, et son fils Philippe qui lui a succédé, le confirme, c’est affaire d’une quinzaine de jours. Désormais, on ensile au stade optimum, pile poil à l’heure et certainement pas un jour de pluie. Fin des années 1970, on commençait dans des maïs verts pour finir dans des maïs gelés. "Mais tout le monde était content", plaide Daniel lui même satisfait de la fiabilité des premières machines. "Fiables à condition d’avoir beaucoup d’outils derrière pour réparer", s’amuse-t-il.
Mais nos pionniers du maïs pensaient-ils à l’époque que les ensileuses évolueraient vers des 10 voire 14 rangs ? "Sans doute pas mais on ne sait jamais dans quel sens le progrès va aller", conclut le plus sage d’entre-eux.
Th. Guillemot
(1) : 27 000 e environ.
(2) : anciens francs soit environ 38 e.
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