Chanvre
Agriculteurs et industriels jouent la carte chanvre
Une nouvelle filière se met en place dans le sud Manche. Le chanvre prend place
dans le paysage. L’outil industriel pour le transformer devrait ouvrir ses portes
au premier semestre 2009, près de Mortain.




face au plastique.
La filière chanvre joue la carte de la proximité. La Chambre d’agriculture et le CRDA suivent le dossier du développement de cette culture. Le projet est né sous l’impulsion de Christophe Barrain. Le chef d’entreprise a mis au point un procédé d’extrusion de chanvre. La technique permet de rendre à une matière malléable la forme d’un profilé à section droite constante. Actuellement, l’entreprise pratique l’extrusion à partir de plastique. Ses profilés sont notamment utilisés pour la fabrication de fenêtres par des industriels comme Lapeyre. “Il est important de mettre en place des projets innovants sur un territoire. Certains ont le chanvre, mais ne disposent pas du savoir-faire industriel. Christophe Barrain maîtrise le métier. Cette idée suit la tendance. Nous allons de plus en plus vers des matériaux à énergie positive”, souligne Serge Deslandes, Conseiller général, agriculteur et élu de la Chambre d’agriculture. L’homme croit au projet et à la chimie verte.
Projet suivi par le CRDA
Jean-Paul Salmon, président du CRDA de la Manche a ensuite pris le relais. Objectif : sensibiliser les agriculteurs. A l’échelle locale, l’agriculture s’engage aux côtés de l’industrie pour le développement économique. Pour la première année, six agriculteurs se sont ainsi lancés dans l’aventure. “Il s’agit de voir où l’on engage les agriculteurs. Nous observons la rentabilité technico-économique. Ces résultats sont bons ailleurs, nous n’avons aucune raison de ne pas réussir ici. Il y a 50 ans, la Manche produisait du chanvre. Historiquement, la Normandie est un important producteur de fibre”, souligne Jean-Paul Salmon. Désormais, agriculteurs et techniciens redécouvrent ensemble le chanvre. La plante monte jusqu’à 3 mètres de hauteur. Ses avantages : elle nécessite une fertilisation azotée limitée et aucun traitement phytosanitaire.
Levée rapide et homogène
“Le meilleur désherbant, c’est le chanvre lui-même. C’est aussi une excellente tête d’assolement. Un blé derrière un chanvre a besoin de moins de phyto que derrière un maïs. Il doit être semé dans un sol bien ressuyé et suffisamment réchauffé. Une levée rapide et homogène conditionne la réussite de la culture”, explique Samuel Hardy, conseiller agronomie et production végétale à la Chambre d’agriculture de Saint-Lô. L’implantation s’effectue mi-mai et la fauche vers le début du mois de septembre. “La plante reste ensuite au sol 8 à 10 jours pour un pressage en balle ronde. On étudie l’utilisation de balles carrées pour limiter le coût de transport”.
180 euros la tonne
Sept parcelles ont été testées via le CRDA. Elles représentent un potentiel de 15 hectares. Les techniciens espèrent un rendement de 10 tonnes par hectare. Les essais ont été fauchés jeudi et vendredi derniers. Ils ont confirmé les espoirs des techniciens. “La récolte s’est plutôt bien passée. Quelques parcelles ont connu un moindre développement, mais il s’explique par les difficiles conditions météorologiques. Les tests prouvent que la région bénéficie d’un potentiel de production assez élevé”, note Samuel Hardy. Ce dernier est également rassuré par les matériels de récolte. Reste à affiner la conduite technique d’implantation. “Nous nous orienterons peut-être vers des variétés plus précoces”. Côté tarif : “180 € la tonne, le contrat a été élaboré par la fédération du chanvre. Ce prix est calqué sur un rendement blé à 80 qx à 200 €/t. L’agriculteur s’engage également à stocker la récolte chez lui”, précise Christophe Barrain. Le chef d’entreprise est ambitieux. Il programme une multiplication rapide des surfaces pour alimenter sa future unité de production.
V. Motin
Le chanvre prend la place du plastique
Le chanvre est la réponse de Christophe Barrain aux donneurs d’ordre. “Ils réclament des produits avec une importante résistance mécanique. Nous avons donc intégré des fibres végétales dans le plastique”. Les tests se révèlent concluants. Le critère environnemental est également non négligeable. La composition des produits peut atteindre 50 % de chanvre. L’entreprise existe depuis 9 ans. Elle emploie une cinquantaine de personnes. Pour pouvoir travailler la fibre de chanvre, une nouvelle structure est en cours de création. Montant de l’investissement 1,5 million d’euros hors bâtiment. L’entité, baptisée Agrochanvre, devrait accueillir 10 nouveaux salariés.
Avec ce processus de fabrication inédit, Christophe Barrain s’attaque à de nouveaux marchés. Fabrication de bardage, de planche de terrasse, ou de tringle à rideau sont au programme. “On prévoit aussi de la matière à extruder”, précise l’entrepreneur.
L’inauguration de l’usine est prévue pour 2009. “Une dizaine d’agriculteurs et un ou deux industriels devaient prendre des parts dans le capital”. Affaire à suivre…