Aviculteur heureux mais avec une épée de Damoclès sur le toit du poulailler
Installé sur 75 ha depuis le 1er janvier à Moussonvilliers (61), Baptiste Hanteneuve a réceptionné ses premiers poussins ce lundi. Il est désormais aviculteur mais avec une épée de Damoclès sur le toit de ses bâtiments.






"Pour consommer français, il faut produire français”. Une lapalissade qu’il est opportun de rappeler à l’heure ou de nombreux travaux de création, de réhabilitation ou d’agrandissement d’élevages sont contrariés par des particuliers alors que le dossier a été instruit et validé par les autorités de tutelle.
Feu vert administratif
C’est la mésaventure que vit Baptiste. Il s’est installé le 1er janvier dernier en reprenant 75 ha du côté de Longny-au-Perche. Mais céréalier sur une telle surface, administrativement, ça ne passe pas. Baptiste Hanteneuve a alors décidé d’asseoir son projet d’entreprise et de vie sur le poulet label.
Son outil ? Deux poulaillers de 400 m2 avec pour chacun un parcours d’un hectare.
Où ? Non pas à Longny-au-Perche mais à Moussonvilliers, au pied de son habitation, et où il est propriétaire des terrains nécessaires à la construction de son projet.
Les plans des bâtiments ont été élaborés par la Chambre d’agriculture de l’Orne. Le permis de construire a été déposé le 9 janvier, validé par l’administration en mai et signé dans la foulée par Monsieur le Maire. Un chantier rondement mené par des artisans locaux et un timing respecté. Depuis lundi, les poussins, qui seront Label Normand à la mi-novembre, s’épanouissent dans ce coin du Perche ornais.
Un recommandé le 7 juillet
Mais un caillou s’est glissé dans la chaussure de Baptiste le 7 juillet sous la forme d’un recommandé. Un recours contre l’arrêté de permis de construire a été déposé par un avocat parisien auprès du Tribunal Administratif de Caen à la demande d’un groupement foncier rural, d’une société civile d’exploitation agricole et d’un couple. Les requérants ne font en fait qu’un. Pour faire simple, il s’agit des propriétaires du château voisin. De source locale, ils ne vivent que quelques semaines par an à Moussonvilliers et font faire à façon les travaux agricoles des terres dont ils sont propriétaires.
Rire, énervement mais aussi peur
Pascal Houlle, maire de la commune, oscille entre le rire et l’énervement. “Ils sont là trois mois dans l’année. Ils ont de l’argent, alors ils s’engouffrent dans le juridique. Tout a été fait dans les règles et la DDT a validé le dossier. Je n’avais aucune raison de le refuser. Si c’était à refaire, je signerais à nouveau et ce n’est pas parce que je suis agriculteur. Nous, élus de petites communes rurales, en avons ras le bol de ces procédures”.
Du côté de Baptiste, c’est plutôt un sentiment d’inquiétude qui prévaut. Alors familialement, on serre les coudes. Notre jeune agriculteur peut compter sur le soutien de son amie, de ses parents Pascal et Catherine, et de sa soeur Anne. “Mon PDE exigeait ce poulailler dans lequel j’ai investi 180 000 e et que je vais commencer à rembourser le mois prochain. J’ai respecté toutes les règles, voire plus même sur le plan environnemental : pas plus de 4 mètres de hauteur avec une toiture couleur tuile, un aménagement paysager avec plantations à venir...” Du beau bâti dans son écrin de verdure.
Veut-on encore produire en France ?
A constater sur place, on perçoit difficilement la gène éventuelle occasionnée. Le poulailler ne jure en rien dans son paysage surtout comparativement au hangar de stockage des années 1980 situé à côté. L’outil de production est situé à plus de 600 mètres du château et n’est visible que des étages supérieurs. Le sera-t-il d’ailleurs encore quand les haies auront atteint l’âge adulte ? A moins que ce ne soit la crainte de l’odeur ? Sans doute un peu au moment de l’épandage du fumier sec, mais justement les terres de Baptiste ne sont pas à portée de nez des habitants de Moussonvilliers. En attendant, la machine judiciaire est en route et nul ne sait où elle mènera les différents protagonistes. On peut cependant rester dubitatif sur cette facilité à dégainer face à un projet structurant et quasi abouti. Les éleveurs, toutes productions confondues, sont dans la panade. Pas besoin d’en rajouter surtout contre un jeune qui vient de relever un challenge.
Au-delà, quel avenir réserve-t-on à l’agriculture française, normande et ornaise ? Baptiste, avec son bâtiment, a créé de l’emploi et continuera à en générer avec sa production labellisée, locale et tracée. L’emploi, toujours une