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Bruno Le Maire : “la vérité est un passage obligatoire en politique”

interview de Bruno Le Maire, député de l’Eure et candidat à la présidence de l’UMP.

© (Photo : http:/ebiche.tumbl.com)

“J’ai été un ministre de l’Agriculture heureux, le monde agricole m’a changé”, indique Bruno Le Maire, qui a occupé le poste de juin 2009 à mai 2012, dans . Alors qu’il mène campagne pour la présidence de l’UMP, il porte un regard très critique sur la politique actuelle.

Après le pacte de responsabilité, le gouvernement Valls II amorce un virage social-libéral, n’est-ce pas un piège pour l’UMP ?
Quel virage social-libéral ? Je vais vous dire franchement : paroles toujours des paroles. Cela fait deux ans et demi que François Hollande balade les Français.
Il dit redonner du pouvoir d’achat aux Français ? Il supprime la défiscalisation des heures supplémentaires, un manque à gagner de 200 euros par mois pour ceux qui pouvaient en bénéficier. Il prétend préparer un choc de simplification ? Il invente le compte pénibilité, un nouveau monstre administratif pour les entreprises. Il promet de réduire les déficits ? Sa réponse : des contrats aidés, des créations de postes dans la fonction publique… des dépenses, des dépenses et encore des dépenses.
Les Français ne sont pas dupes. Il faut arrêter de leur mentir matin, midi et soir ! Ce que je souhaite : qu’on ne promette pas ce que l’on ne peut pas tenir. C’est ce que j’ai fait au ministère de l’Agriculture. Cela a été difficile au début, c’est dur d’entendre qu’il n’y a plus d’argent public pour accompagner chaque crise. Mais je n’ai jamais menti aux paysans, et j’ai tenu les engagements que je leur avais présentés.

Vous avez été ministre de l’Agriculture, quel est votre regard sur la situation actuelle des agriculteurs ?
Une nouvelle loi sur l’agriculture vient d’être adoptée. Elle propose certes quelques avancées, notamment sur le statut de l’agriculteur, mais je continue de penser que ce texte est un écran de fumée pour masquer le vide total de politique agricole du gouvernement. Les agriculteurs veulent des décisions, pas une loi !
Les sujets de préoccupation ne manquent pas. L’embargo russe menace les marchés de produits agricoles. La nouvelle condamnation de la France par la Justice européenne sur les nitrates jette encore la suspicion sur les agriculteurs qui ont déjà fait tant d’efforts. La baisse généralisée des aides PAC qui va affaiblir encore des filières qui peinent face à la concurrence internationale. Et comme si ça ne suffisait pas, l’Europe est sur le point de brader son agriculture dans le cadre des négociations avec les USA et le Mercosur !
Mais ne nous jetons pas des sacs de cendre sur la tête. Il existe des motifs d’espoir. L’agriculture française est une agriculture moderne, performante et diversifiée. Nous avons la chance inouïe d’avoir une agriculture présente sur tout le territoire. Il faut se battre pour nos modèles agricoles.
Pour cela, il faut de véritables décisions. Où est le choc de simplification promis par François Hollande ? Si nous voulons préserver et renforcer notre agriculture, il faut lui donner les armes de faire jeu égal avec nos concurrents, en arrêtant de lui remettre une nouvelle invention règlementaire par jour et en lui mettant à disposition des outils économiques pour s’en sortir.

Y-a-t-il des choses que vous auriez pu mieux faire ?
Si nous avions tout fait parfaitement avec la majorité précédente, nous serions sans doute encore au pouvoir ! J’ai été un ministre de l’Agriculture heureux, le monde agricole m’a changé. D’abord parce qu’il est attachant, et aussi parce qu’il est exigeant. Ce que j’ai fait en tant que ministre de l’Agriculture, je l’assume. J’ai, dès mon arrivée, étais très clair : il n’était pas question de mentir aux paysans français, comme ça a pu être le cas par le passé.
Alors, il y a des choses dont je suis très fier, comme le G20 agricole ou la mise en place de l’Observatoire des prix et des marges, qui met enfin de la transparence dans les prix alimentaires. Ensuite, il y a des outils qui ont eu plus de mal à fonctionner : les contrats dans leur mise en place par exemple. Toutefois, je continue de penser qu’il faut des outils de régulation et de stabilité pour les agriculteurs, notamment en vue de la sortie programmée des quotas laitiers en 2015.
Il y a également un sujet que je n’ai pas abordé en tant que ministre : l’assurance. Avec les épisodes de sécheresse et intempéries à répétition cette année, il faut des produits assurantiels accessibles à l’ensemble des agriculteurs, en particulier les jeunes qui s’installent. Les agriculteurs ne peuvent plus vivre sous perfusion de l’Etat dès qu’il y a un problème. J’ai vu que la FNSEA s’était emparée du sujet lors de son dernier congrès à Biarritz et c’est une bonne chose. 

Notre dossier d’octobre porte sur la lutte contre le gaspillage et l’économie circulaire. Avez-vous des propositions sur le sujet ?
A l’heure où tous les budgets sont rabotés, la question du gaspillage est plus qu’important, elle est stratégique, d’une part sur un plan moral, mais aussi sur le plan économique.
Prenez l’exemple de l’agriculture et des intrants. Aujourd’hui, nous avons une agriculture moderne avec des outils et des connaissances techniques qui permettent de mettre exactement le bon dosage de produit, au bon endroit et au bon moment. On est loin de l’idée de l’épandage massif qu’on colle systématiquement aux agriculteurs. C’est à la fois un gain pour l’environnement, c’est aussi un gain économique pour l’agriculteur qui va limiter ses achats de produits. Je pense donc que c’est la recherche et l’innovation ont un rôle incontournable sur ce sujet.
Evidemment quand on parle de gaspillage, on pense d’abord aux questions de l’énergie et de l’alimentation, deux secteurs stratégiques où cette lutte est essentielle. Ce que fait Solaal sur le plan logistique pour accompagner les associations d’aide alimentaire est remarquable !

Vous avez des ambitions au sein de l’UMP, n’avez-vous pas peur d’un retour     de Nicolas Sarkozy ?
Je dis et le maintiens : je suis candidat pour gagner. Je le porte en moi, je sens que le renouveau est nécessaire à l’UMP : dans les idées, dans les pratiques politiques et dans les visages. Je ne suis pas là pour faire de la figuration, je suis candidat par envie et par enthousiasme.

Vous publiez un court ouvrage (136 pages)  “A nos enfants”, que voulez-vous leur dire ? Pourquoi maintenant ?
Je veux dire à tous ceux qui croient qu’il n’y a plus d’espoir dans notre pays qu’on peut encore construire quelque chose de nouveau. Quand je vois que les parents sont inquiets pour leurs enfants parce qu’ils risquent de s’en sortir moins bien, ça me donne une énergie folle pour me battre. Il y a des atouts en France, il n’y a pas grand-chose à changer, il suffit de faire confiance aux Français !
J’ai écrit ce livre à la fin de l’année dernière, mais il tombe à un moment où je crois que les gens ont besoin de renouveau et de sortir de ce système qui ne marche pas depuis 30 ans. C’est un appel à croire en soi, à croire en la France !
Et il y a ce besoin de se dévoiler. Je crois que la sincérité et la vérité sont un passage obligatoire en politique. J’avais aussi besoin de dire qui j’étais, quelles sont mes origines. On imagine mal que j’ai eu une arrière-grand-mère brésilienne, un arrière-grand-père pied-noir, et pourtant c’est le cas. C’est un parcours familial singulier parmi 65 millions d’autres parcours français. Nos identités ne se résument pas seulement à des parcours universitaires ou professionnels.  Le mien ne vaut pas plus qu’un autre mais c’est justement ce qui fait la force de notre Nation : notre diversité.

Ancien diplomate et député de l’Eure
Bruno Le Maire est entré en politique en travaillant avec Dominique de Villepin aux Affaires étrangères, puis à Matignon. En 2007, il choisit de se présenter dans la 1re circonscription de l’Eure, dont il est toujours député. En 2008, il rejoint le gouvernement aux Affaires européennes, puis à l’Agriculture jusqu’en 2012. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur le pouvoir : “Le Ministre”, “Des Hommes d’Etats” et “Jours de pouvoir”. Ancien diplomate, il a démissionné de la haute Fonction publique et se présente aujourd’hui à l’élection de Président de l’UMP.

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