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conjoncture
Comment faire face à la flambée des prix des matières premières ?

L’envolée des cours des matières premières depuis l’été dernier risque de peser lourd dans la trésorerie de nombreuses exploitations laitières de Normandie.

© CA 61

Cela est d’autant plus délicat qu’elle fait suite à une saison fourragère 2010 marquée par la sécheresse, qui a déjà mis à mal les stocks fourragers et la trésorerie. L’Institut de l’élevage annonce dorénavant une hausse de + 15 à + 25 € par 1 000 litres pour 2011 par rapport à l’année précédente. Face à cette situation, il faut être vigilant pour ne pas revivre de que nous avions connu lors de la précédente flambée de ces matières premières de l’hiver 2007-2008.


Pour économiser du concentré, favorisez d’abord l’ingestion de fourrages sans les gaspiller

La mise à disposition des fourrages doit permettre à tous les animaux d’en consommer à volonté. Les fourrages présentés doivent être appétents pour en maximiser l’ingestion : retrait des parties moisies à la reprise ou dans le tas, retrait quotidien des refus à l’auge. Les ensilages doivent être désilés avec précaution afin d’empêcher l’air de rentrer dans le tas en cours d’utilisation. Les entrées d’air génèrent des moisissures qui dégradent l’appétence ainsi que la valeur nutritive de l’ensilage.


Le rendement marginal des concentrés baisse avec un niveau élevé de concentré

“Le plus n’est pas le mieux”. La maîtrise des quantités de concentrés distribuées est souvent un volet possible d’économie. L’ajustement du niveau azoté de la ration est le premier élément. Dans une ration mélangée et équilibrée dont le niveau azoté recherché est de 110 g PDI/UFL, une réduction de 10 g PDI/UFL, qui correspond à l’économie de 1,4 kg de tourteau de soja ou de 2,2 kg de colza par vache et par jour, entraînera une baisse de production modérée de 0,9 kg de lait par vache et 0,3 g de TP. En période de prix élevé du tourteau de soja, cette pratique devient économiquement intéressante. Le niveau d’équilibre à 100 g PDI/UFL est celui visé lorsque l’on a une stratégie de production de lait par les fourrages, quel que soit le prix du correcteur azoté.Le niveau d’apport éventuel de concentrés de production est le second élément. Le concentré de production distribué en plus de la ration collective a un rendement marginal modéré, en particulier parce que l’ingestion de fourrage diminue (0,5 kg MS de fourrage/kg de concentré). En pratique, ce rendement est de 0,7 à 0,9 kg de lait/kg de concentré supplémentaire. Ce rendement dépend toutefois du niveau d’apport initial de concentrés et du type de ration (ration 100 % ensilage de maïs ou ration composée d’ensilage de maïs et d’ensilage d’herbe).


Privilégiez le tourteau de colza au tourteau de soja

Le tourteau de colza 35 est intéressant s’il est proposé, rendu exploitation, à moins de 75 % du prix du tourteau de soja 48 dans les mêmes conditions de présentation pour une ration à base d’ensilage de maïs. Comme vous le relèverez sur le graphique, ce ratio est actuellement de 70 %. Il a quelque fois atteint les 75 %, mais nous l’avons connu aussi proche des 50 % fin d’année 2009. Ce prix d’intérêt du tourteau de colza industriel tient compte du fait que pour des régimes comportant 50 % d’ensilage de maïs ou plus parmi les fourrages, il faut utiliser un aliment minéral vitaminique sans phosphore complémentaire, donc moins coûteux. Dans le cas de dépassement de son quota en matière grasse, le prix d’intérêt du tourteau de colza se situe autour de 70 %. Pour les régimes à base d’herbe fanée ou ensilée, où les besoins d’azote complémentaire sont modérés, l’utilisation de tourteau de colza est économiquement intéressant s’il est acheté à moins de 70 % du prix du tourteau de soja. Ce prix d’intérêt plus bas est dû aux moindres effets zootechniques sur ces régimes, qu’avec ceux comportant du maïs (plus de lait et de TP, moins de TB) (tableau).


Pour une bonne gestion du pâturage, mettez à l’herbe tôt et contrôlez la hauteur d’herbe

Pour assurer une bonne valorisation de l’herbe pâturée, la mise à l’herbe nécessite une transition progressive entre le régime hivernal et l’herbe jeune très riche en eau (15 % MS). Le temps de pâturage doit s’allonger progressivement. Les premiers jours, les vaches ne séjournent sur la pâture que quelques heures en milieu de journée, puis la journée entière, enfin nuit et jour lorsqu’il n’y a plus de risque de gelée. Durant cette transition, qui doit durer au moins 2 semaines, les vaches doivent continuer de recevoir les fourrages hivernaux lorsqu’elles sont enstabulation.La sortie doit s’effectuer le plus tôt possible, dès que le sol est portant. Le pâturage commence en pratique à une hauteur d’herbe de 9-10 cm (herbe à la cheville). Cette pratique permet d’utiliser une herbe feuillue de bonne valeur nutritive dès la mise à l’herbe, de favoriser le tallage et donc d’obtenir des repousses feuillues. Cela permet aussi d’empêcher ou de retarder l’épiaison qui diminue la valeur alimentaire de l’herbe et éclaircit la prairie. L’alimentation concentrée est maintenue en début de transition ; elle est ajustée en fin de transition selon la part d’herbe dans la ration et la qualité de l’herbe.


L’herbe jeune et feuillue couvre la production d’un troupeau à 25 kg de lait

Selon l’INRA, un troupeau qui a production laitière potentielle de 25 kg de lait, et consommant de l’herbe pâturée sans complémentation avec une hauteur d’herbe en entrée de parcelle de 10 à 12 cm, et une hauteur d’herbe en sortie de 5,5 à 6 cm (mesurées à l’herbomètre), a une ingestion potentielle moyenne de 16 à 18 kg de MS par vache et par jour. Ceci assure alors une production laitière de 25 kg de lait. Dans ce troupeau, les vaches ayant une production laitière supérieure consomment plus d’herbe et l’herbe pâturée leur assure un niveau de lait plus élevé.

Le concentré au pâturage, à consommer avec modération

Au pâturage, en conditions non limitantes (plus de 5,5 cm de hauteur d’herbe; stade feuillu ; herbe non souillée), les vaches ont une capacité d’ingestion d’autant plus importante que leur potentiel de production est élevé. L’apport de concentré se substitue d’autant plus à de l’herbe, (fourrage très ingestible, riche en énergie et en protéines), que le potentiel laitier de la vache est faible. L’apport de 1 kg de concentré au pâturage a une efficacité moyenne de 0,8 kg de lait.L’efficacité du concentré au pâturage est plus forte dans le cas de hauteurs d’herbe en entrée de parcelle supérieures à 12 cm (à l’herbomètre) et en sortie de parcelle inférieures à 5 cm, parce que dans ces conditions,le concentré se substitue peu à l’herbe. Dans le cas de hauteurs d’herbe en entrée inférieures à 12 cm et de sortie supérieures à 6 cm, l’apport de concentré au pâturage est peu efficace.


Au pâturage, choisissez d’abord un concentré énergétique

L’herbe jeune et feuillue est un aliment riche en énergie et en azote. Si l’on veut apporter du concentré en complément du pâturage et parce que les aliments azotés sont chers, il est plus judicieux de choisir un aliment énergétique. Des céréales broyées ou aplaties conviennent très bien. Face à la hausse également conséquente de ces dernières, il faudra les réserver d’abord aux fortes productrices (> 28-30 kg lait) et (ou) aux animaux en début de lactation. Cet apport sera effectué dans la limite de 2 à 3 kg par vache pour en optimiser l’usage.


Assurez une transition et ajustez la correction azotée

En cas d’apport fourrager complémentaire après une période de plein pâturage, il est nécessaire d’assurer une transition pour permettre l’adaptation de la flore ruminale qui assurera la valorisation maximale de la ration fourragère. Selon le niveau d’introduction de complément fourrage, la transition durera de 5 à 10 jours. Lorsque l’herbe pâturée constitue plus de la moitié de la ration, il n’est pas nécessaire de corriger le fourrage complémentaire en azote. Celui apporté en excédent par l’herbe assure la correction. Avec un apport de maïs ensilage supérieur à une demi-ration, celui-ci sera corrigé en azote, par exemple avec 150 g de tourteau de colza au printemps et 200 g de tourteau de colza avec de l’herbe d’été par kg d’ensilage de maïs distribué.


Récoltez l’herbe au stade optimum pour économiser du concentré l’hiver prochain

Il est évidemment difficile de prévoir la qualité de récolte des fourrages de 2011. Il paraît cependant important de rappeler que plus les fourrages sont récoltés proches du stade optimum moins ils nécessiteront de complémentation en énergie voire en azote. En particulier, pour l’herbe récoltée sous forme ensilée, enrubannée ou fanée. Il ne s’agit pas de prédire la météo, mais de voir si a priori un regard sur son parcellaire et l’organisation du travail peut améliorer le stade de récolte et les conditions de stockage. Par ailleurs, une prévision de pâturage et des parcelles à récolter doit être réalisée dès la mise à l’herbe. Même si les conditions climatiques viendront sans doute modifier cette prévision, un schéma d’organisation clair dès le départ, facilite les prises de décisions en cours de saison de pâturage.Avec un poste alimentaire qui représente en moyenne de 20 à 25 % du coût de production d’un atelier laitier, il est impératif d’être vigilant sur le volet concentrés. Comme nous le notons souvent dans de nombreuses études de groupe, la différence de revenu se fait souvent sur ce poste pour les exploitations les plus performantes. Cependant, il ne faut pas négliger la gestion des fourrages et particulièrement celle de l’herbe dans les leviers d’économies. Le redressement du prix du lait à la production est une bonne chose, mais attention de ne pas consommer cette amélioration du prix par une augmentation du coût alimentaire. Par ailleurs, les investissements sont à bien raisonner. La fluctuation des prix de ces dernières années doit être prise en compte et inciter à la prudence. Cette stratégie est une nécessité afin de maintenir une bonne trésorerie de votre entreprise ou de l’améliorer avec un marché du lait porteur pour ces prochains mois.

Biblio

Article rédigé à partir du dossier spécial de l’Institut de l’Elevage “Flambée des prix des matières premières” de février 2011.Retrouvez l’intégralité de ce dossier sur le site de l’Institut de l’élevage à l’adresse suivante : www.idele.fr

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