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Dans l'Orne : la “grande distrib” chausse les bottes

FDSEA et JA ont invité, jeudi dernier, la grande distribution à chausser les bottes pour un échange in situ au GAEC Leblond à Caligny. Le dialogue l’a emporté. Reste à transformer les bonnes intentions en €.

© TG

“Je vous invite à venir me rencontrer dans mon magasin mais sans benne ni lisier. Le 11 juillet dernier, ça m’a coûté 30 000 € de dégâts. J’ai les boules”. Paroles tenues par un gérant de supermarché du bocage ornais à l’attention du syndicalisme agricole, jeune et aîné. Preuve que la pression terrain fonctionnne mais qu’elle ne se suffit pas pour faire aboutir les revendications. FDSEA et JA ont donc changé de braquet en faisant appel à l’Etat pour arbitrer les rapports de force .  Quelques heures plus tôt à travers un tour de ferme, Anne-Marie Denis (présidente de la FDSEA) et Fabien Durand (secrétaire général de JA) exhortaient la grande distribution à une revalorisation des prix du lait et de la viande payés aux producteurs.

Quelques bons points
Premier motif de satisfaction pour la FDSEA et les JA, la grande distribution ne s’est pas “débinée”. S’il y a avait bien quelques absents (pour cause légitime d’agenda), ceux-ci se sont engagés à recevoir dans les plus brefs délais les responsables syndicaux pour un échange “constructif”.
Autre motif de satisfaction, la grande distribution a pu appréhender le métier d’éleveur, avec toute sa noblesse et ses contraintes quotidiennes, au fil de la visite des ateliers lait et viande du GAEC Leblond. Il a été beaucoup question d’alimentation des animaux, de filières qualité, de traçabilité mais aussi de contraintes environnementales avec ses coûts induits comme la fumière. “Le plus beau bâtiment de l’exploitation pour de la merde”, soulignait avec un brin d’agacement un responsable syndical.
Un échange quasi consensuel donc puisque, du côté de la distribution, on semble aussi crouler sous la contrainte de normes européennes retranscrites en droit français avec, semble-t-il aussi, un certain excès de zèle.


La patate chaude change de main
Mais tous les dossiers ne sont pas partagés. Quant la question du prix a été abordée, la patate chaude a changé de main. “On vend notre lait 100 € les 1 000 litres de moins que l’an dernier alors que le prix en rayon n’a pas baissé, a dégainé en premier Max Vié. Qui se met la différence dans la poche ?”. Idem pour la filière viande.  Réponse de la grande distribution : “j’achète le lait au même prix que l’an dernier. Pour la viande, ça n’a pas forcément bougé non plus”. Alors c’est la transformation et les industriels qui se mettent sous la gouttière ? “Quand on va voir Bigard, il nous dit le contraire”, faisait remarquer justement  Dominique Bayer, responsable viande bovine de la FDSEA. “Bigard dispose de marges de manœuvre plus importantes que les nôtres”. Parole de distributeur avec son pendant en filière lait : “on ne négocie pas les prix avec Lactalis”. Et si la transparence n’est pas de mise dans certains cas, elle s’exhibe dans d’autres. Et Intermarché d’insister sur les 340 €/1 000 litres payés par la laiterie Saint-Père (44). “Une contractualisation qui marche”. 

400 exploitations ornaises à revenu négatif
Pour la ferme ornaise, l’état d’urgence est décrété. “400 exploitations de notre département ont sorti en 2015 un revenu inférieur à zéro”, a souligné Anne-Marie Denis. Mais à les écouter, la distribution ne serait pas non plus l’eldorado que l’on imagine. “Un magasin, à la fin, c’est 2 % de résultat, ça peut vite déraper. J’en connais qui perdent de l’argent. C’est le volume qui fait la différence”.
Mais premièrement, pour faire du volume, il faut des consommateurs et quand on sait qu’un agriculteur génère 7 emplois directs, on peut avoir des doutes sur la pérennité de l’équation si la ferme départementale met la clé sous la porte. Deuxièmement, pour faire du volume, il faut une production. Là encore, on peut avoir des doutes sur la pérennité de l’équation si la ferme départementale met la clé sous la porte. A moins que l’on ne fasse appel à l’export. “On fait ce que l’on veut sur notre rayon boucherie traditionnelle. On le maitrise. Chez nous, c’est 100 % viande française à travers un réseau d’une soixantaine de producteurs locaux. Par contre, on ne maîtrise pas les produits industriels”. Un peu du bis repetita quand un accord avec la grande distribution sur le prix du lait avait été trouvé. Les MDD (Marque de Distributeur) avaient joué le jeu, pas les grandes marques.

Etiqueter les plats cuisinés
A travers le rayon des produits industriels, se pose la question de l’étiquetage de l’origine des ingrédients présents dans les plats cuisinés. “Ça, c’est un dossier européen”, plaide la grande distribution. Force est de constater que la France, sans grand succès pour l’instant, tente de faire bouger les lignes. La grande distribution ne peut cependant pas totalement se dédouaner sur le sujet. C’est elle qui décide de l’importance qu’elle consacre à son rayon traditionnel. Et puis, les plats cuisinés, ça peut être aussi un rayon traiteur digne de ce nom privilégiant l’approvisionnement local. Reste pour finir la communication. Tant que les grandes enseignes se battront sur le terrain de la pub pour savoir qui est le moins cher, il y a fort à parier que la pression prix  s’exercera inexorablement dans l’étable et sans tenir compte de la hausse des coûts de production.

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