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Gestion
Découplage :quel changement dans la conduite de l’entreprise ?

Le découplage, en modifiant les conditions d’attribution des aides PAC, transforme l’analyse de rentabilité et la hiérarchie des marges des activités agricoles.

Les critères de mesure de la performance d’une exploitation comme l’EBE (excédent brut d’exploitation) et le revenu disponible restent pertinents. Le découplage suggère toutefois un nouveau regard sur la gestion de l’exploitation. Percevoir des DPU entraine un certain nombre de charges incompréssibles : foncier, entretien des terres dans le respect de la conditionnalité, assurances, etc. Le versement des aides découplées peut générer un revenu indépendamment de l’activité productive. Ce solde, appelé Excédent Brut Découplé, correspond à l’excédent brut que dégagerait l’exploitation en dehors de toute production.

L’excédent brut découplé (EBD) : interprétation de cet indicateur
Un EBD positif signifie que les aides découplées couvrent plus que toutes les charges incompressibles (non liées à l’activité productive). Dans ce cas, l’exploitant dispose de marges de manœuvre pour piloter son exploitation, prendre des risques, faire face aux aléas du marché. A l’inverse, un EBD négatif rend l’exploitation plus dépendante du marché car la vente des produits doit couvrir non seulement les charges liées à la production mais aussi un "déficit" structurel. Dans ce cas, l’exploitant devra plutôt s’orienter vers des productions moins risquées en terme de marché et/ou engager une réduction de ses charges incompressibles.
Mais l’EBD peut aussi être comparé avec l’EBE pour donner tout son sens au regard du pilotage de l’entreprise. En effet un EBD supérieur à un EBE de croisière signifie que l’activité productive est déficitaire. Dans ce cas, après avoir vérifié les calculs, une reconversion forte de l’exploitation est à envisager (réduction importante des charges, amélioration des produits liés à la vente…). Dans la plupart des cas, l’EBD des exploitations est plus faible que l’EBE, l’activité de production apportant des gains par rapport à une absence de production.

Performance économique des différents ateliers : revoir la hiérarchie des marges
Avec le découplage, une partie parfois importante des aides n’est plus affectable aux différents ateliers de production, leur versement n’étant plus lié à cette production. Les marges par atelier doivent donc être calculées sans les aides découplées. Ceci modifie parfois la hiérarchie des marges entre les ateliers : des productions autrefois rentables peuvent ne plus l’être du tout du fait du découplage !

Découplage et références économiques
Le niveau des soutiens découplés n’a rien à voir avec la technicité du chef d’entreprise ou le contexte pédoclimatique. Ainsi, les études de groupe doivent-elles aussi évoluer pour continuer à jouer leur rôle "d’étalonnage de la performance". Comment créer une référence moyenne représentative à partir de données propres à l’entreprise et son histoire? Deux exploitations laitières au niveau technico-économique identique peuvent afficher des résultats fondamentalement divergents à cause d'une valeur de DPU différente.
Toutefois, au vu des éléments décrits précédemment, il est clair que le comportement des entreprises va être différent selon leur niveau d’Excédent Brut Découplé. Pour intégrer ces différences, le niveau d’EBD pourra être utilisé comme facteur discriminant d'une typologie.
Michel LAFONT - Guillaume GAUTIER LAIR
Chambres d’Agriculture de Normandie et de la Manche

Source : Fiche n° 3 du Référentiel Découplage

Michel LAFONT

Avant 2003 ou après 2003 : une autre façon de faire

 

“Accompagner l’agriculteur dans ses choix”. Telle était l’ambition des Chambres d’Agriculture de Normandie dans le cadre du projet “produire des méthodes et outils pour les conseillers et différents types d’agriculteurs pour faire face aux exigences de la PAC”. Un chantier qui a duré 3 ans pour aboutir notamment à un synopsis : le référentiel découplage. Les explications de Michel Lafont, chargé de mission économie à la CRAN. 

 

Michel Lafont, quel est le point de départ de ce projet DAR (devenu CASDAR) mené par 28 Chambres d’agriculture dont les 6 de Normandie ?
Une page s’est tournée en 2003 avec la réforme de la PAC. On est passé de l’avant à l’après découplage avec une phase d’attentisme. Nous nous sommes trouvés confrontés à une très forte demande de visibilité et de lisibilité des agriculteurs. Il nous fallait répondre à cette attente. 

Quel était l’objectif ?
L’objectif central fut de produire des outils et des méthodes de conseil afin d’aider les agriculteurs à définir de nouvelles perspectives sur leur exploitation, à en piloter le devenir et à gérer les informations d’une nouvelle façon. Dans une première phase, il s’est agi de mieux connaître les attentes et les besoins des agriculteurs. Puis le projet a permis d’élaborer de nouveaux outils pour l’accompagnement des agriculteurs.

Parmi ces outils, il y a le “Référentiel découplage”. C’est la boite à outils de l’après 2003 ?
Le “Référentiel découplage” est un outil d’accompagnement des agriculteurs dans leurs choix. Mais il est à l’usage des conseillers. Il comprend 14 fiches thématiques pour aider au pilotage de l’exploitation avec le découplage sous l’angle réglementaire d’une part, sous l’angle de gestion de l’entreprise d’autre part. Il a été rédigé par une équipe de techniciens, de juristes et de chargés d’étude. La CRAN et la Chambre d’Agriculture de la Manche y ont participé.

Un des volets du projet consistait à mettre au point une méthode d'animation de groupe d'agriculteurs. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Il s’agit d’une démarche de recherche-action (appuyée par VIVEA et l’Union Européenne) qui a réuni 11 groupes d’agriculteurs dont 2 du Calvados. Des agriculteurs en phase de réflexion dans leur stratégie d’adaptation. Le principe est axé sur le dialogue et l’échange. Cela nous a permis de mieux comprendre les modes de prise de décision et d’établir même une carte mentale des différents processus de réflexion. Au bilan, cette formation affine et conforte les agriculteurs dans leur projet. Les 10 Chambres qui l’ont expérimentée l’ont toutes reconduite l’année suivante. 

Au bout du compte, ce travail vous amène-t-il à repenser le métier de conseiller ?
Il n’y a plus aujourd’hui de modèle unique. Jusqu’en 1992, la donne était relativement simple. Les prix étaient garantis et relativement élevés : plus tu produisais, plus tu gagnais. Désormais, les agriculteurs sont confrontés à des prix non garantis et mondiaux, très fluctuants à la hausse et à la baisse. Chacun doit donc adapter sa stratégie en fonction de ses objectifs, de son outil, de son contexte... Le métier de conseiller aujourd’hui doit intégrer davantage l’écoute et le questionnement. L’objectif étant de faire cheminer l’agriculteur dans son projet.
Propos recueillis par Th. Guillemot

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