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Emmanuel Frimout (président de la coopérative Linière de Cagny-14) : emblavement lin, être volontariste

« Les stocks actuels de filasses sont faibles et il serait imprudent et même coupable de notre part que de n’avoir pas suffisamment de matière à proposer aux filateurs. A Cagny, il faut être volontariste et je ne peux que vous inciter à accompagner cette évolution positive de notre marché. Depuis 5 ans, c’est bien le lin qui habille nos exploitations ». Pour Emmanuel Frimout (président de la coopérative Linière de Cagny-14-qui tenait sa 52e assemblée générale vendredi dernier) le bonheur, et même s’il n’est pas absolu, est dans le lin

> Qu’en est-il des investissements à la coopérative Linière de Cagny ?
En premier lieu, j’évoquerai l’automatisation de la pesée des filasses qui donne entièrement satisfaction. Elle libère du temps humain tout en diminuant la pénibilité du travail.
Ensuite, il y a la réfection de la cave et le changement des turbines qui nous permettront de gagner en cadence tout en réalisant des économies sur le poste entretien. Ces investissements, qui s’inscrivent dans une stratégie globale, sont gages de pérennité de notre outil de transformation au service des adhérents.

>> Des investissements qui vont se traduire par une augmentation du coût de teillage ?
Il n’y aura pas d’incidence négative même si la coopérative sera fermée en août et septembre prochains pour retrouver son rythme de croisière en novembre.
Je tiens d’ailleurs à ce titre à remercier les salariés qui ont accepté une réorganisation provisoire de leur temps de travail.

>> Quid de la récolte 2016 ?
Autant 2015 nous a agréablement surpris en quantité et surtout en qualité, autant nous sommes allés de déconvenues en déconvenues concernant 2016. Ce cru est décevant en quantité, sensiblement identique à la précédente avec un poids moyen de 6,2 t/ha, et surtout en qualité avec des lins plus ternes et 8% de tris.

>> En terme de prix de vente, cela se traduit comment ?
Avec un niveau à 2,18 €/kg, nous sommes dans la moyenne nationale. Signalons aussi que la parité des monnaies n’a pas joué en notre faveur.

>> Apparement, les lins d’hiver ont plus souffert ?
Ils ont souffert effectivement d’une fin de printemps exécrable. Sur les 210 ha emblavés, 10 % environ n’ont pas pu être teillés faute de rentabilité économique. Les richesses sont faibles (15,8 %) et la qualité globalement mauvaise.
Néanmoins, on constate depuis plusieurs années que les lins d’hiver arrachés tôt, plutôt sur le vert, sont ceux qui atteignent un rouissage satisfaisant. Sur 2017 et en petites terres, ils devraient mieux s’en tirer.

>> Justement à propos de 2017, quelles sont les tendances ?
Les 50 ha teillés nous donnent une première idée. Le tonnage devrait être faible, de l’ordre de 5 t/ha, mais avec une qualité supérieure à 2016. Un bémol cependant : les fibres sont difficiles à nettoyer et les cadences vont s’en ressentir. Au final, le cru 2017 devrait révéler une grande disparité d’un secteur à l’autre, d’un type de terre à l’autre. Le printemps sec en est la cause et les quelques journées caniculaires de juin auront achevé les plantes avant qu’elles n’aient pu finir naturellement leur cycle de vie. Nous avons vu s’évaporer des quintaux de filasses et de graines. 

>> Vous appelez à une augmentation des emblavements ?
Malgré l’arrivée de nouveaux adhérents que je tiens à saluer, nos surfaces sont stables. Parallèlement, le marché est porteur et les stocks actuels de filasses sont faibles. J’estime donc qu’il serait imprudent, et même coupable de notre part, de n’avoir pas suffisamment de matières à proposer aux filateurs. A Cagny, il faut être volontariste et je ne peux qu’inciter nos adhérents à accompagner cette évolution positive du marché.
Au-delà, il est de notre devoir d’anticiper et d’accélérer notre réflexion sur la place de la culture du lin dans des modèles agricoles aujourd’hui nouveaux mais qui prévaudront demain avec une pensée particulière pour les jeunes.

>> En d’autres termes, vous dites « oui plus d’hectares de lin ». Où placez-vous le curseur ?
Plus 10 %, ce serait bien.

>> Mais un retournement de marché rapide, vous y pensez ?
On ne peut pas l’écarter mais à nous, liniculteurs, d’actionner les bons leviers pour l’anticiper. Je pense par exemple à une gestion des stocks de paille à la ferme qui aboutirait à une meilleure régulation de l’offre en cas de nécessité.

>> Dans cette perspective, un rapprochement avec la coopérative Linière du Nord de Caen vous rendrait plus fort ?
Nous avons accueilli favorablement sa demande de travailler 200 ha de ses lins. Ayant à l’esprit une logique de bonne gestion d’entreprise, ces deux mois de travail supplémentaires nous ont permis de sécuriser et même conforter notre report de paille. Ensuite, de rester corrélés au marché. Enfin, d’éviter à l’extrême le recours à un chômage partiel.
Pour être complet et dans l’éventualité d’une récolte européenne lourde en 2018, auquel cas nous devrions solidairement organiser la gestion du stockage de paille, il sera toujours plus serein de l’appréhender sans la contrainte d’avoir un report insuffisant.

>> Où en êtes-vous dans le contrat de mariage ?
Le projet est amorcé et si l’accouchement peut paraitre long, nous disposons de la maîtrise du temps nécessaire de façon conjointe et concertée.

>> Il faut nécessairement être gros pour encore exister demain ?
Il nous faut grandir pour transmettre le flambeau. Les exemples ne manquent pas dans la coopération linière. Terre de Lin, Agylin (...) sont des coopératives qui ont su garder leurs outils de proximité tout en se donnant les moyens humains et financiers d’accroitre leurs missions coopératives.

>> L’un des facteurs limitants au développement, c’est l’homme ?
Tout agriculteur subit sur son exploitation une pression sociétale qui s’accroît. Parfois avec raison, mais parfois aussi hélas de façon passionnée et irraisonnée.
J’entends par pression sociétale les réglementations en tout genre, les transformations structurelles nécessaires, la mondialisation et ses effets pervers non régulés... Tout cela grignote la disponibilité nécessaire à l’implication des dirigeants et accentue le risque et la pression sur leurs épaules. Qui demain pour assumer cette responsabilité en l’état ? Qui peut raisonnablement penser qu’on puisse être le capitaine à la barre d’un navire et en même temps au charbon dans la cale du bateau ?

>> La fenêtre de tir à ce rapprochement est donc bonne ?
Nous sommes conscients que si le ciel est plutôt bleu aujourd’hui sur nos coopératives, et c’est rare en ces temps-ci, il pourrait vite s’assombrir si nous ne nous donnons pas les moyens humains pour être acteurs sur les dossiers émergents qui sont nombreux.

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