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Elections municipales
En veille foncière au niveau de la CDD

Déjà maire-adjoint de Chevry (50), Arnaud Legoupil, jeune agriculteur de 34 ans, brigue un second mandat en tant qu’élu municipal. Son credo : éviter le gaspillage foncier au niveau de la CDD (Comunauté de Communes) de St-Lô.

© TG

Il n’y aura pas de surprise au soir du second tour des municipales à Chevry. Une seule liste et pas de candidature indépendante dans ce village de 90 habitants (selon l’INSEE) mais en réalité de 110 âmes, dont 35 enfants de moins de 12 ans. Avec les nouvelles règles électorales, Monsieur le Maire, et ses 6 colistiers dont 3 nouvelles têtes, retrouvera son fauteuil sans avoir eu besoin de battre le pavé. “L’ambiance est cordiale dans notre commune. Il n’y a pas de rivalité”, note Arnaud Legoupil. Elu pour la première fois conseiller municipal en 2008, il est devenu premier maire-adjoint quelques mois plus tard du fait du déménagement du titulaire du poste.

la commune la plus rapidement déneigée du canton
Une fonction à laquelle il consacre, outre 3 heures de permanence à la mairie toutes les 4 semaines, du temps pour les menus travaux allégeant ainsi le budget communal (45 000 e), “des bricoles de finition sur le logement communal, des remorques de cailloux...” Certains hivers, il y a aussi le déneigement au tracteur. “Chevry serait la commune la plus rapidement déneigée du canton. C’est ce qui se dit !”, s’amuse-t-il. Avec une telle qualité de service, pas étonnant que l’opposition soit inexistante. Mais ce n’est pas la seule raison. Dans la composition de la nouvelle liste (qui passe de 9 à 7 élus), les 4 sortants-repartants ont joué la carte de la mixité “pour faciliter le vote”. Ils sont allés chercher 3 femmes et il n’y aura finalement que 2 agriculteurs à siéger au conseil. Une équipe rajeunie avec des trentenaires, des quadragénaires, des quinquagénaires mais pas de retraité. Non pas qu’ils n’en voulaient mais les retraités ont pris la poudre d’escampette.
Ainsi l’activité agricole ne sera guère contrariée par les autorités locales lors du prochain mandat. “Mais attention, prévient Arnaud. C’est au niveau de la CDD (Ndrl : St-Lô, 73 communes, 70 000 habitants) qu’il faut veiller au grain. La proportion d’agriculteurs y est de moins en moins importante et c’est là que se prennent de plus en plus de décisions”. Un enjeu capital au regard du classement en zone vulnérable. Le futur agricole se dessine aussi aujourd’hui dans les urnes municipales. Qu’on se le dise dans les campagnes et en campagne.

Pascal Perrineau, directeur du CEVIPOF (Centre de recherches politiques de Sciences Po)

Les agriculteurs doivent se réengager sur la scène municipale

Pour Pascal Perrineau, le monde agricole a un défi à relever : s’engager de nouveau dans les conseils municipaux, instances où ils sont de moins en moins nombreux.

Pourquoi les agriculteurs sont-ils sous représentés dans les conseils municipaux ?
Pascal Perrineau. En 1977, 40 % des maires étaient des agriculteurs, salariés ou exploitants agricoles. Aujourd’hui, ils ne sont plus qu’entre 16 et 18 %. Pourquoi une telle érosion ? D’une part, la part des agriculteurs dans la population active diminue. D’autre part, le métier de maire devient de plus en plus compliqué. Les charges et les responsabilités du maire sont de plus en plus fortes. De plus, l’intercommunalité se développe et les maires urbains prennent l’avantage par rapport aux maires ruraux. Le métier de maire demande du temps et les agriculteurs n’en ont pas toujours. Ce sont des entrepreneurs qui travaillent dur et longtemps. Il est d’ailleurs intéressant de voir que la catégorie qui monte le plus chez les maires est celle des retraités parce qu’ils ont du temps.

Quels sont les moyens pour que les agriculteurs soient de nouveau visibles dans les mairies ?
Il faut que les agriculteurs se rendent compte que ce qu’ils représentent sociologiquement, économiquement et culturellement a besoin d’être défendu politiquement. Il faut un certain volontarisme. Les agriculteurs doivent se réengager sur la scène municipale. Sinon, ils seront peu à peu marginalisés alors que ce milieu professionnel reste décisif pour la France. C’est d’autant plus important que les agriculteurs renvoient une bonne image par rapport à d’autres milieux professionnels. Ils représentent le passé et l’avenir : la France a été jusqu’à une date relativement récente un grand pays agricole, les Français ont des liens familiaux avec le milieu agricole. Concernant l’avenir, l’agriculture française n’a pas à rougir d’elle-même. C’est une puissance exportatrice phénoménale. C’est un des éléments décisifs de la richesse française. On parle du déclin industriel mais jamais du déclin de la puissance agricole. Les agriculteurs ont des atouts mais encore faut-il savoir en jouer. Cela demande une vraie détermination de leur part et que les institutions qui les représentent fassent passer ce message : engagez-vous !

On entend souvent dire que les agriculteurs votent plus souvent à l’extrême. Est-ce une idée reçue ?
C’est un stéréotype qui ne correspond pas à la réalité. En ce qui concerne l’extrémisme, du moins à droite, ce n’est pas chez les agriculteurs mais chez les ouvriers et les employés que le Front national atteint ses meilleurs niveaux. Toutes les enquêtes montrent que le Front national est à la hausse alors que jusqu’à maintenant il était marginalisé, plus particulièrement dans les municipales. En 2014, le Front national aura beaucoup plus de listes qu’en 2008 donc mécaniquement son score montera et il bénéficiera de cette gauche impopulaire et de cette droite divisée. On annonce un score élevé sensiblement au-dessus de la barre de 10 % des suffrages exprimés.
Les agriculteurs sont comme les autres catégories de Français. Dans certains endroits de la France, il peut y avoir des phénomènes de radicalisation à droite vers le Front national mais cela n’est pas plus important chez les agriculteurs qu’ailleurs. Néanmoins, le monde agricole est beaucoup plus à droite que beaucoup d’autres catégories sociales. C’est historique. Le tropisme de l’agriculteur est en faveur de la droite mais essentiellement de la droite classique comme les forces centristes, le centre droit, l’UMP. Mais il est vrai que, comme d’autres catégories professionnelles, on assistera à une poussée du Front national car on sait que la crise économique et financière, le malaise vis-à-vis des institutions européennes sont des facteurs qui donnent au Front national un espace politique qu’il n’avait pas jusqu’alors.

Que se passera-t-il si le Front national fait un bon score ?
La stratégie de Marine Le Pen est différente de celle de son père. Le Front national tente de devenir un parti attrape-tout, de tous les milieux sociaux, en faisant des promesses qu’il ne pourra pas tenir. Mais la politique c’est aussi la protestation, l’expression de colères. Et là, Marine Le Pen est comme une éponge qui tente de capter toutes ces colères, ces inquiétudes et ces revendications. Le Front national reste un vrai parti protestataire. C’est très bien d’être élu dans un courant de protestation mais une fois au pouvoir, il faut gérer. Il faut faire avec les contraintes économiques, sociales et politiques. Les choix extrêmement anti-européens de Marine Le Pen pourraient avoir des conséquences délétères dans un milieu comme l’agriculture qui, certes a un rapport difficile à l’Europe, mais qui bénéficie aussi de la politique agricole commune. Sur le terrain européen et économique, Marine Le Pen cherche à développer des positions extrêmement protectionnistes. Dans un premier temps, le protectionnisme peut soulager mais dans un deuxième temps, dans une économie ouverte, il déclenchera des réactions de la part des partenaires économiques qui seront redoutables, surtout pour l’économie agricole très exportatrice.

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