Grandes cultures
Le grand écart dans les récoltes
Baisse des productions de céréales à paille, reprise en maïs, baisse confirmée de la production de colza et forte progression du tournesol, récolte record pour les pommes de terre : telles sont les dernières estimations récemment présentées par le ministère de l’Agriculture.
Dans sa note « Agreste » sur l’état des cultures et des récoltes au 1er août, le ministère de l’Agriculture apporte plusieurs modifications, attendues, à ses premières prévisions de juillet. Elles concernent notamment les céréales à paille, dont la baisse de récolte s’accentue. Ainsi, la production de blé tendre est ramenée de 31,3 à 29,7 Mt, conséquence de l’ajustement en baisse des surfaces, mais surtout du rendement moyen national réduit à 68,3 qx/ha, soit près de 11 qx de moins que l’an dernier. Cette récolte serait inférieure de 24,9% à celle de 2019 et de 15,9% à celle de la dernière moyenne quinquennale. En dehors de la récolte exceptionnellement basse de 2015/2016 (27,5 Mt), il faut remonter à 2003/2004 pour trouver une récolte française sous le seuil de 30 Mt. Malgré une légère reprise des emblavements, + 2,5% sur 2019, sauf dans les régions « traditionnelles » du Sud de l’hexagone, la prévision de production de blé dur a dû être revue en baisse après une nouvelle réduction du rendement, estimé à 51,6 qx/ha, 12 qx de moins que l’an dernier, et la récolte prévue à 1,3 Mt, en retrait de 17% sur l’an dernier et de 27% sur la moyenne quinquennale.
L’estimation de la production d’orge a été diminuée de 1Mt par rapport à l’annonce de juillet, pour s’établir à 11,3 Mt, soit un recul de 17,8 % sur 2019 et 3,5 % sur la moyenne quinquennale. Le rendement moyen national tombe à 57,4 qx/ha, contre 70,7 l’an dernier et 61 annoncé en juillet.
Les premières prévisions de production de maïs grains sont encore très prudemment formulées à 14,4 Mt (dont 268 000 t de semence) ce qui signifierait une reprise de 10,8 % sur 2019 et de 1 % sur la moyenne 2015/2019, le rendement étant espéré à 88,7 qx/ha. La récolte de maïs fourrage pourrait atteindre 17,3 Mt.
Le soja poursuit sa progression
S’agissant des oléagineux, la faiblesse de la récolte de colza annoncée il y a un mois est légèrement accentuée avec 3,33 Mt, 4,8% de retrait sur la précédente récolte et 35,7% de moins que la moyenne quinquennale. En cause : les excès d’eau et de sécheresse, une gestion difficile des ravageurs. Cependant, les teneurs en huile sont meilleures en 2020 que l’an dernier. En revanche, avec 1,78 Mt prévues, la production de tournesol augmenterait de 37,4% sur 2019 et de 31,3% sur la moyenne quinquennale. L’expansion de la culture du soja se poursuit ; avec 199 000 t envisagées, la récolte 2020 dépasserait celle de l’an dernier de 16,3% et la moyenne quinquennale de 45,1%.
La récolte de protéagineux, qui s’achève, a été peu modifié par rapport à juillet, avec 890 000 t, dont 696 000 t de pois et 177 000 de féveroles. La baisse des rendements a annulé la sensible hausse des surfaces. La prévision de récolte de pommes de terre de conservation est portée à un nouveau niveau record de 6,62 Mt, en hausse de 1,2% sur celui de 2019 et de 13,9% sur la moyenne 2015/2019. La récolte de pommes de terre de féculerie progresserait de 1,9% en un an, pour atteindre le million de tonnes. Le ministère de l’Agriculture n’apporte pas d’information nouvelle sur la betterave industrielle, rappelant simplement l’estimation de surface à 423 000 ha, en repli de 24 000 ha sur 2019.
« Une année très décevante »
« La moisson est terminée. Il reste quelques céréales de printemps mais elles sont en train d’être battues (à date de vendredi 7 août, NDLR). L’année est décevante voire catastrophique. C’est un ressenti assez général dans la région. Les orges, les premières à être moissonnées, ont des rendements extrêmes, de 30 à 80 q/ha pour les excellentes parcelles autour de Granville et du Mont-Saint-Michel. Les colzas sont décevants. Les blés sont aussi très hétérogènes mais la moyenne tourne autour de 45-50 q/ha, contre 70-75 q/ha pour une année normale. La qualité est correcte, malgré un manque parfois de protéines. Les rendements en paille sont catastrophiques. Chez moi, je fais 2,5 t/ha contre 5 t/ha en temps normal. Dans le département, la moyenne est de 2 à 3 t/ha, contre 6 t/ha habituellement. La moisson est finie partout, toutes les régions sont concernées par le déficit de paille. Dans la Manche, 10 000 ha de blé n’ont pas été semés à cause des mauvaises conditions météorologiques. Ces surfaces ont été remplacées par des céréales de printemps ou du maïs. Pour le moment, les maïs vont bien mais nous attendons la pluie car des feuilles commencent à s’enrouler. Les céréales à pailles ont subi les attaques de pucerons. On voit ce que donnent les restrictions de produits phytosanitaires pour les betteraves. Nous allons droit dans le mur avec les céréales à paille et le maïs si les grains ne sont plus protégés. »