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PAC après 2013
Les débats sous hautes pressions

Pour définir la future politique agricole, les débats s’engagent à Bruxelles sous de fortes pressions du contexte politique, économique, international et environnemental.

Quand, à Bruxelles, on parle de l’après-2013, de quoi parle-t-on ? Trois débats se superposent.
Le premier concerne un réexamen de toutes les politiques de l’Union, et en particulier de la politique d’aide aux régions en retard de développement. Ce débat, demandé par Tony Blair en 2006, tombe bien pour certains acteurs politiques. Il permet en particulier au nouveau Parlement, au nouveau président de l’Union, à la nouvelle Commission européenne de profiter de cette remise à plat pour faire avancer leurs idées.
Le second débat est une bagarre budgétaire. L’Europe planifie ses dépenses pour 7 ans. Nous vivons aujourd’hui sous la planification septennale des budgets 2006-2012. La prochaine concernera donc 2013-2020. Toutefois, il est possible que cette planification soit raccourcie à 5 ans pour caler avec la durée du mandat de la plupart des instances européennes. On discutera donc des grandes masses d’argent à attribuer à l’agriculture, mais aussi aux régions en retard, mais aussi à la recherche, à la formation, à la politique extérieure, etc.
Enfin, le troisième débat concernera la PAC en elle-même. Que faire en matière d’aides aux agriculteurs ? De gestion des marchés et de politique environnementale ?
Ces trois débats vont progresser en parallèle dans des contextes politiques, socio-économiques et internationaux, qui influeront fortement sur les choix à effectuer. Certains observateurs se demandent si une marge de manœuvre existe, et de quelle épaisseur est-elle ?

De nouveaux acteurs politiques
Le Parlement européen va prendre un poids plus important avec le nouveau traité de Lisbonne : alors qu’il n’avait qu’un rôle consultatif sur la PAC jusqu’ici, les parlementaires seront désormais sur un pied d’égalité avec le Conseil des ministres ; c’est ce que l’on nomme la codécision, dans le jargon européen.
La Commission européenne gardera un rôle central dans le processus de discussion à venir. Un nouveau commissaire à
l’Agriculture est arrivé : Dacian Ciolos. Quelles seront ses options ? Sera-t-il moins libéral que Mariann Fischer-Boel ? Il est trop tôt pour le dire.
Les pays du nord de l’Europe font une radicale remise en cause des dépenses consacrées à l’agriculture, le Royaume-Uni en particulier. C’est la justification des aides envers une catégorie professionnelle tout entière qui est remise en cause. La PAC représentera 32 % du budget de l’Europe en 2013. La tentation d’utiliser ces crédits vers d’autres secteurs (recherche, innovation…) sera très forte.
Les ressources financières agricoles 2007-2013 ont été fixées par l’accord Chirac-Schröder en 2004. Un pareil diktat du couple franco-allemand sera-t-il encore possible demain ? La solidité et l’efficacité de ce couple franco-allemand seront un élément déterminant de la discussion.
Les pays nouveaux adhérents de l’Est militent pour un rééquilibrage des budgets entre l’Est et l’Ouest. En régime de croisière les DPU seront deux fois plus élevés à l’Ouest qu’à l’Est. Cet écart pourra-t-il être justifiable ?

Un contexte économique difficile
La croissance économique sera-t-elle de retour en 2013 ? La Commission européenne prévoit une baisse du PIB européen de 4 % en 2009 puis une remontée progressive à partir de 2010 sur la tendance de long terme de + 2 %. L’Europe de l’Est a connu une croissance double de la zone Ouest depuis son adhésion en 2004. Elle semble aussi se redresser plus vite de la crise.
Les déficits budgétaires des États causés par la crise économique seront énormes : les ministres des finances exerceront une très forte pression pour la réduction des déficits. Dans ce contexte, créer des dépenses supplémentaires pour l’Union européenne semble impossible. Même si l’Europe n’a jamais fait d’emprunt, ses ressources représentent à peine 1 % du revenu national des 27 pays, et l’augmenter semble hors de question.
Le marché européen est l’essentiel des débouchés de l’agriculture européenne, sans doute plus de 95 % du débouché. L’évolution du revenu des européens, sera donc déterminante pour les équilibres des marchés européens. La croissance du revenu des 10 pays d’Europe de l’Est sera notamment importante à suivre. Les revenus y sont plus faibles qu’à l’Ouest et les besoins de consommation alimentaire plus dynamiques.
Par contre, le marché mondial est un débouché plus accessoire (moins de 10 % des ventes) pour l’agriculture européenne, sauf pour quelques produits comme le blé ou le porc.

Sous la pression des négociations commerciales internationales
Un second accord agricole à l’Organisation mondiale du commerce sera probablement conclu avant 2013. La négociation agricole est déjà très aboutie sur le plan technique, il ne manque pratiquement que la signature globale pour donner une valeur contraignante à ces mesures.
Les conclusions du cycle de négociation reprennent les 3 grands volets de l’accord agricole de 1994 (Marrakech). Sauf nouveauté dans la dernière ligne droite, le futur accord diminuera les droits de douane de manière plus importante pour les produits plus protégés (beurre, viandes). Un nouvel accord interdirait les restitutions à l’export (encore existantes en produits laitiers, céréales, viande bovine, porc, poulet entier), ce qui constituera notamment un problème pour la gestion des crises de marché. Un nouvel accord à l’OMC renforcera les disciplines relatives au soutien à l’agriculture Les soutiens “verts” (aides découplées, 2e pilier) resteront autorisés sans limite de montant.
Et s’il n’y avait pas d’accord à l’OMC ? L’actuel accord de Marrakech resterait en application. De plus, il existe une forte volonté européenne d’aller plus loin dans le libre-échange : cela entraînera une renonciation aux restitutions, ainsi que la conclusion d’accords commerciaux bilatéraux qui impliquent des baisses des protections douanières importantes. On pense à l’accord avec l’Amérique du Sud, mais beaucoup d’autres sont prêts. L’accord avec le Maroc est le dernier en date.
Que les négociateurs parviennent à un nouvel accord GATT ou que se multiplient des accords bilatéraux de l’Europe avec d’autres zones du monde, le résultat est le même : la pression pour l’ouverture internationale de l’agriculture sera toujours présente.

N’oublions pas l’environnement
La PAC d’après 2013, sera fortement conditionnée par les questions environnementales. Que ce soit sur le front de la lutte contre la pollution par les nitrates, ou de la réduction des produits phytos, la pression ne se relâchera pas.
De plus, la grande question environnementale des années 2013-2020 sera la lutte contre le réchauffement climatique. Les débats ne font que commencer et ils sont déjà très vifs ! N’oublions pas non plus dans les questions qui prennent de l’importance la question de la protection des animaux (le “bien-être animal”). Les instances européennes cogitent sur un vaste plan de mesures législatives, notamment sur la protection des bovins.
Philippe LEGRAIN
Chambre d'Agriculture de la Manche
www.manche.chambagri.fr

L’après 2013 : calendrier des négociations
Novembre 2009 : premier document non officiel de la Commission européenne sur la révision budgétaire.
Janvier 2010 : 1er débat en conseil des ministres d'Agriculture.
2010 : premier document chiffré de la Commission sous forme de scénarios.
2011 : Projets de règlements soumis au Conseil des Ministres et Parlement :
décisions en 2011 ou 2012.

 

Pour en savoir plus
Sur le site des Chambres d’agriculture de Normandie, 8 notes sur les différents aspects de la négociation et les idées qui circulent :
www.normandie.chambagri.fr/pac

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