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AFDI Normandie
Les paysans contrent la faim

“Il est possible d’accroître la production agricole moyenne mondiale de l’ordre de 25 % à l’hectare”. Un message d’optimisme délivré par Marcel Mazoyer, ancien président de comité du programme de la FAO

Bonne participation des OPA (Organisation Professionnelle Agricole) à l’occasion du colloque organisé le 14 décembre dernier par les AFDI (Agriculteurs Français et Développement International) Haute et Basse-Normandie en collaboration avec la CRAN (Chambre Régionale d’Agriculture de Normandie) et les participations du Crédit Agricole Normandie, du Mémorial de Caen et du Conseil régional. Thème central des débats : “Les paysans contrent la faim dans le monde” avec deux temps forts. L’intervention de Marcel Mazoyer (ingénieur agronome, professeur émérite Agro Paris Tech et ancien président du comité du programme de la FAO sur “la fracture agricole et alimentaire mondiale : causes, conséquences et perspectives”. Un discours décapant suivi d’une table ronde “carrefour d’expériences des organisations paysannes et de leurs partenaires” où ont témoigné notamment Nedim Kasami et Naman Sidibé, paysans Macédonien et Malien.

Un holocauste tous les ans
Le développement durable ne veut pas dire préserver les ressources de la planète mais répondre aux besoins actuels et de tous”. D’emblée, Marcel Mazoyer a remis certains mots dans le bon sens. L’urgence n’est  pas de préserver mais de créer des ressources. Urgent ? Oui parce que sur les 6,8 Mrd d’humains, 3 se privent de nourriture, 2,2 souffrent de malnutrition et 9 millions en meurent chaque année. “Autant que l’holocauste et la très grande majorité sont des paysans”. Pas du côté des paysans tractorisés (28 millions de tracteurs dans le monde) mais de ceux qui utilisent  les 250 millions d’animaux de travail. Du côté du milliard d’agriculteurs qui travaillent uniquement avec des outils à main. Du côté encore des 500 millions qui n’utilisent ni semences commerciales, ni engrais, ni pesticides et enfin du côté des 200 à 300 millions de paysans qui ne disposent que d’une fraction d’hectare à cultiver.  Peut-on, à la lecture de ces chiffres éloquents, considérer que notre modèle agricole constitue le chemin à suivre ? Pas totalement mais il ne faut pas jeter l’eau du bain avec le bébé. Marcel Mazoyer plaide pour une “ révolution agricole des temps modernes”, révolution teintée un peu plus vert. “Les techniques connues, corrigées de leurs excès pour être durables, permettraient de maintenir la production par hectare dans la moitié du monde qui a le plus progressé et surtout de la doubler dans la moitié du monde qui a le moins progressé.Ce qui permettrait d’accroître la production mondiale de 25 %”.

Plus de terres qu’il n’en faut
Autre idée préconcue balayée d’un revers de joute oratoire par notre professeur émérite : la problématique foncière. “Il y a plus de terre qu’il n‘en faut pour nourrir toute la planète. Un hectare de colza pour faire du bioéthanol ne prive pas quelqu’un de nourriture à l’autre bout du monde”. Selon lui, notre planète en 2075 avec ses 9,5 Mrd d’habitants pourrait cultiver une surface multipliée par 1,7. Sans compter même les effets du réchauffement climatique qui n’a, à ce niveau, pas que des inconvénients.
Par contre, Marcel Mazoyer n’est pas tendre avec “le marché international agricole, ce n’est que 10 % des productions mais la spéculation provoque la retombée des prix. L’économie de la production doit suivre l’économie de la consommation”. Le prix du blé en 1947 équivalait à 555 e, 200 e en 1972, 600 e en 1975 et on connaît le tarif aujourd’hui. De l’eau au moulin nourricier de ceux qui réclament, sous une forme ou une autre, plus et non pas moins de régulation. Car comme s’interrogeait Jacques Picard, membre d’AFDI, “semer son blé en fonction du cours à Chicago, c’est à dire une année et pas l’autre. Quelles conséquences pour la sécurité alimentaire ?”

Maintenir des paysans au village
Après avoir refait le monde agricole en y jetant un regard macroéconomique, retour sur le terrain plus terre à terre de l’action avec le travail mené par les AFDI depuis plus de 30 ans. “Accompagner l’émergence d’associations professionnelles, des actions basées sur les échanges d’expériences”, a insisté Marie-Odile Tavernier, présidente d’AFDI Basse-Normandie. “Mais aussi former des leaders et des responsables pour maintenir des paysans au village”, a rebondi Richard Demuynck, son homologue Haut-Normand. Un travail qui porte ses fruits patiemment à maturité. S’il reste du chemin à parcourir, la Macédoine compte désormais une centaine d’organisations de paysans ayant pour objectifs “de représenter et défendre les intérêts des agriculteurs”, a expliqué Nedim Kasami, vice-président de la Fédération des Paysans de la République de Macédoine. Déja des acquis avec une fiscalité agricole revue et corrigée mais encore beaucoup de fers au feu avec le prix du lait qui a chuté de 50 à 25 centimes après la faillite d’une laiterie.
Des difficultés aussi mais beaucoup d’espérances relayées également par Naman Sidibé, paysan malien et membre du bureau de l’association des organisations professionnelles paysannes de la région de Koulikoro. Un pays où l’on a compris “que le développement n’est pas seulement au niveau des techniques mais beaucoup par le renforcement des liens entre agriculteurs”.
Le mot de la fin pour Daniel Génissel : “si politiquement les agriculteurs ont suffisamment de moyens pour faire leur travail, nous aurons gagné notre pari de lutte contre la faim”.

Pascale Cauchy, Conseil régional de Basse-Normandie : “Produire plus pour dégager du revenu »
• Le Conseil régional de Basse-Normandie, à travers la voie de sa déléguée à la coopération décentralisée, partage cette vision de “partenariat de territoire à territoire à travers l’échange sur les politiques publiques” plutôt qu’à travers l’appui financier ou l’assistanat. “L’aide alimentaire fait plus de mal que de bien quand elle s’inscrit dans la durée”, juge Pascale Cauchy. Sa préférence : “produire plus pour dégager du revenu. C’est valable au Nord comme au Sud”.  Même en Normandie ? Concrètement, la Région aide au financement de plus de 200 structures et institutions bas-normandes , dont l’AFDI, qui ont pour objectif de coopérer avec les pays émergents et en développement. C’est ainsi qu’elle a signé en 2007 un programme triennal de coopération avec la République de Macédoine. “Fruit d’une volonté commune de participer au développement des deux territoires, cette coopération incite non seulement les populations à s’engager dans une citoyenneté locale et européenne active mais encourage aussi les coopérations institutionnelles et économiques. Tout cela, dans un esprit de réciprocité et d’échanges”, insiste Laurent Beauvais, président de la Région Basse-Normandie. Domaines concernés: l’usage des TIC (Technologie de l’Information et de la Communication), mobilité internationale des jeunes, citoyenneté locale et européenne active, éducation, formation et orientation professionnelle, francophonie, société de l’information et médias, politiques culturelles, promotion du tourisme durable et valorisation du patrimoine.

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