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Thierry Roquefeuil, secrétaire général de la FNPLait
Les producteurs n’ont pas à boucher les trous d’une quelconque entreprise

Le groupe fromager Entremont Alliance a déclenché un dur conflit avec ses producteurs de l’Ouest en août dernier, après l’annonce d’une baisse du prix du lait pour le troisième trimestre, profitant de la dérégulation instaurée dans le secteur. L’entreprise a finalement reculé. Elle vient de récidiver en annonçant une baisse du prix de 70 euros pour 1 000 litres pour le quatrième trimestre. Les producteurs crient à la « provocation » en pleines négociations interprofessionnelles pour accoucher d’une nouvelle gouvernance sur le prix en 2009. Thierry Roquefeuil, le secrétaire général de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), commente la situation pour Agriculture Information.

Nous avons six mois, jusqu’au début du deuxième trimestre 2009, pour se donner de la stabilité.
Nous avons six mois, jusqu’au début du deuxième trimestre 2009, pour se donner de la stabilité.
© DR

Entremont vient d’annoncer une baisse du prix du lait pour le quatrième trimestre. Sommes-nous à la veille d’un nouveau conflit très dur entre le groupe fromager et ses producteurs ?
Le groupe Entremont a décidé unilatéralement de baisser le prix du lait payé à ses producteurs, sans aucune concertation ! C’est insupportable ! Les producteurs qui livrent à cette entreprise, mais aussi au niveau national, allons réagir dans les jours prochains, et nous allons innover dans notre démarche syndicale, c’est tout ce que je peux vous dire.
C’est du mépris que d’entendre de la part du PDG d’Entremont Alliance (Christian Mazuray, ndlr. Une interview parue dans La Tribune du 29 septembre) que son entreprise n’a pas à « subventionner les producteurs de lait ». La situation économique du groupe Entremont est liée à la fois à l’évolution des marchés – certains produits industriels sont moins bons comme la poudre, le beurre ou le lactosérum –, et à l’évolution de l’entreprise : en 2007, les résultats du groupe étaient positifs ; aujourd’hui, les actionnaires ne sont plus prêts à soutenir l’entreprise si le cap est trop difficile à passer. Ce qui est insupportable, c’est que quand ils gagnent de l’argent, nous n’en voyons pas la couleur, et quand ils en perdent, les producteurs, eux, doivent en perdre.

Que reprochez-vous au groupe Entremont ?
S’ils veulent des marchés sans régulation, il faut en assumer les conséquences. Ils doivent accepter que la variabilité du marché soit intégrée à la gestion de l’entreprise, et utiliser les bonnes années pour compenser les mauvaises. Ce ne sont pas aux producteurs d’entrer dans cette démarche. Nous sommes fermes sur ce point. Les producteurs sont conscients que l’environnement économique actuel du groupe est difficile mais pour les producteurs aussi, avec la hausse de leurs charges d’exploitation (+20 % en un an, en raison notamment de l’aliment, ndlr). Nous ne sommes pas là pour boucher les trous d’une quelconque entreprise !
Quant à la réactivité réclamée par Entremont, j’aurais aimé que les transformateurs en parlent il y a un an, quand les prix de certains produits industriels étaient à la hausse. Je ne suis pas sûr que chez eux la réactivité existe à la hausse.
Entremont s’est désolidarisé du cadre dans lequel on fonctionnait, le cadre de l’interprofession, pour que producteurs et transformateurs puissent légitimement avancer dans une filière stable. La position du groupe fromager : « j’y vais tout seul ! », c’est de la provocation ! Qu’Entremont maintenant ne vienne pas véroler les rencontres interprofessionnelles des six mois à venir !
Justement, ces négociations pour de nouvelles modalités de fixation du prix du lait en 2009, sont en cours. Un prix national est-il envisageable alors que les entreprises ne valorisent pas les mêmes produits ?
Nous avons six mois, jusqu’au début du deuxième trimestre 2009, pour se donner de la stabilité. Le préambule de l’accord de 1997 sur la recommandation nationale du prix du lait indiquait déjà qu’il ne pouvait pas y avoir un prix unique national. Le travail de la recommandation d’un prix chaque trimestre était justement de permettre aux entreprises d’adapter cette recommandation au niveau de leurs marchés, et au niveau régional.
Aujourd’hui, avec une filière plurielle, il faut continuer au niveau de l’interprofession à avoir des discussions sur l’évolution du prix, qui permettent à la fois au producteur et au transformateur de s’inscrire dans la durée. Les choses sont déjà avancées d’ailleurs : l’interprofession va être l’initiateur des indicateurs nationaux pour la fixation du prix, et de la lecture des marchés. Puis, les interprofessions régionales travailleront sur une consolidation de ces indicateurs à la lecture de la présence des entreprises et de la situation des producteurs sur ces régions. La recommandation nationale n’existera plus, mais nous allons vers une stabilité que nous avons perdue depuis six mois. Nous avons toujours en tête toutefois le cadre interprofessionnel, il n’est pas question d’une contractualisation entreprise par entreprise.
La ligne rouge a été franchie par les pouvoirs publics avec la loi sur la modernisation de l’économie (LME) et le courrier de la DGCCRF dérégulant le secteur laitier. Ils illustrent un schéma libéral qui était dans le vent. Mais depuis quelques jours, on parle de réguler le libéralisme en France, face à la crise financière internationale. Ca nous fait plaisir car nous plaidons depuis longtemps pour l’organisation des filières et la régulation des marchés.

La fin des quotas laitiers a été programmée pour 2015. Comment y travaillez-vous ?
Nous avons créé au sein de la FNPL des groupes de travail pour se repositionner face à cette question. Notre credo, que les pouvoirs publics ont du mal à saisir, est l’adéquation de l’offre et de la demande, la maîtrise de la production pour garantir des prix rémunérateurs. Il faut y travailler, et nous affirmerons certains principes lors de notre Assemblée générale du Mans, les 24 et 25 mars prochains. Ce travail de prospective, nous souhaitons aussi l’avoir avec nos collègues européens. Et peut-être qu’avec les soubresauts de la crise financière, la donne va changer, ce qui nous permettra de réaffirmer avec plus de force notre credo.

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