Aller au contenu principal

Ligne THT : l'éleveur remporte le premier round

RTE, filiale d'EDF, vient d'être condamnée par le tribunal de Coutances, en première instance, à indemniser l'EARL Charuel, située dans le sud-Manche.

© EC

Pour Thierry Charuel, installé sur la commune-canton d'Isigny-le-Buat, à une trentaine de kilomètres de la baie du Mont Saint-Michel non loin de Saint-Hilaire-du-Harcouët, les ennuis commencent lorsqu'il modifie son atelier "lait" en 2003, peu après son installation. "Avec mon épouse, nous avions repris une exploitation dont les installations étaient vieillissantes. Notre but ? Déplacer la stabulation. La nouvelle structure s'est retrouvée plus proche que la précédente de la ligne THT 400 000 volts, construite dans les années 1980. Bien sûr, les performances du troupeau (70 VL) n'étaient pas au top, mais nous avons d'abord mis ça sur l'ancien système". Notre couple d'éleveurs cherche de son côté la performance en investissant au maximum, notamment dans un robot de traite.

Difficultés grandissantes
"Au fil des mois, les performances n'étaient toujours pas à la hauteur, pire les difficultés s'amplifiaient". Du coup, le GPSE, Groupement Permanent de Sécurité Électrique, composé de représentants de nombreuses structures(1), est saisi du dossier. Les techniciens se succèdent sur
l'exploitation, sans réelle amélioration, même après l'installation de treillis pour empêcher
"l'énergie" d'entrer dans le bâtiment ou la suppression du fil de terre d'un pylône de ligne. "Après avoir joué la carte du partenariat avec RTE de 2006 à 2009, nous avons voulu fédérer, en 2010, toutes les instances pour faire pression sur la filiale d'EDF"... qui n'a rien voulu savoir. Notre couple d'éleveurs essaye de changer de site. "Nous n'avions pas beaucoup de marge de manoeuvre. La Chambre d'agriculture n'a pas donné son accord ; le terrain retenu  étant encore trop près de la ligne. Il était impossible de délocaliser ailleurs".
Un événement curieux intervient en août 2012. La ligne 400 000 volts est coupée pour entretien. "Aussitôt nous avons constaté une amélioration des performances laitières et de l'état sanitaire des animaux pendant un mois, autrement dit le laps de temps correspondant à la coupure. Ensuite, tout s'est à nouveau dégradé. La laiterie voulait même nous interdire de collecte". Le couple Charuel décide de jeter l'éponge en matière d'élevage. Fin 2012, c'est l'arrêt du lait puis de l'atelier porcs "sur lequel on notait aussi un impact de la ligne THT".

Porter plainte
Face au mastodonte RTE, Thierry Charuel et son épouse décident de croiser le fer. "Nous avons essayé jusqu'au bout d'aller à l'amiable. En 2013, nous avons porté plainte pour l'ensemble des préjudices engendrés sur notre ferme". Le combat a été payant, du moins en première instance. Le 5 janvier dernier, le tribunal de Coutances a rendu sa décision : "le préjudice subi par l'EARL Charuel du fait du passage de la ligne à proximité et de l'impossibilité de poursuivre l'exploitation dans de bonnes conditions doit être indemnisée". Indemnisation à hauteur de 142 000 EUR. "Une première victoire, commente Thierry Charuel, mais qui couvre à peine les pertes. Je souhaite que notre combat serve d'exemple aux autres agriculteurs qui rencontrent les mêmes difficultés avec RTE. Nous avons souvent été seuls. Je suis notamment amer vis-à-vis de la Chambre d'agriculture de l'époque. Elle avait refusé de nous transmettre les comptes-rendus RTE". "Ce dossier de la THT, partout en France, s'apparente à celui de l'amiante. Pour raison d'État, on ne veut pas écouter les agriculteurs" explique Dominique Vauprès, voisin de Thierry Charuel. Lui-même s'est retrouvé avec ce type de problèmes sur
la commune voisine de Mont-Gothier. "J'ai dû transférer
mon exploitation à quelques kilomètres sans aucun dédommagement de la part de RTE. J'ai été débouté en référé".
Et Thierry Charuel de conclure, "nous ne sommes pas contre le progrès, loin de là, mais nous ne voulons pas être sacrifiés au nom de la raison d'État. RTE va sans doute faire appel de la décision en première instance. Je continuerais à me battre". L'EARL a gagné le premier round, mais le match est loin d'être terminé.
1 : Chambre agriculture, préfecture, GDS, RTE, éleveur, vétérinaire de l'exploitation, vétérinaires conseils (Nantes), Littoral Normand

Sous-titre
Vous êtes abonné(e)
Titre
IDENTIFIEZ-VOUS
Body
Connectez-vous à votre compte pour profiter de votre abonnement
Sous-titre
Vous n'êtes pas abonné(e)
Titre
Créez un compte
Body
Choisissez votre formule et créez votre compte pour accéder à tout l'Agriculteur Normand.

Les plus lus

GAGNEZ 2 PLACES POUR LE MATCH SM CAEN - PARIS FC
Jeu concours pour aller encourager votre club normand au stade d'Ornano !
Deuxième en partant de la droite, Philippe Denis a reçu dans sa ferme un parterre de responsables, dont Arnaud Rousseau (deuxième en partant de la gauche).
Tuberculose : Arnaud Rousseau à l'écoute des éleveurs
À l'occasion de sa visite dans l'Orne, Arnaud Rousseau s'est rendu à Landigou, sur l'exploitation de Philippe Denis, dont le…
Valentine Amette, 22 ans, céréalière, s'est lancée dans son projet de meunerie. La Farine de Valentine est disponible à la boulangerie de Pont-d'Ouilly, de Fresné-la-Mère ou encore chez elle, à Bazoches-au-Houlme, les premiers lundis du mois, de 9 h à 12 h.
Valentine Amette, agricultrice au champ et au moulin
Nous l'avions rencontré en fin d'année dernière, alors qu'elle se présentait au concours Miss agricole 2024. Alors aux champs,…
Toutes les animations sont gratuites (sauf la restauration et le baptême en hélicoptère).
Des bonshommes de paille débarquent dans la Manche
À la veille des moissons, les Jeunes agriculteurs ont monté des bonshommes de paille un peu partout dans la Manche. Un bon moyen…
Cette baisse des volumes a été annoncée alors même que "nous sortons d'une période compliquée", dénonce Yohann Serreau, président de l'OPNC (570 producteurs, 422 ml de lait).
Lactalis confirme la baisse de ses volumes
À l'assemblée générale de l'OPNC (Organisation de Producteurs Normandie Centre), organisée à Sées, dans l'Orne, en juin 2024 et…
"Transmission-installation, que peut-on faire de plus ?" Tel était le thème de la table ronde à laquelle participaient Clotilde Eudier (vice-présidente de la Région Normandie), Emmanuel Hyest (président de la Safer de Normandie), Anne-Marie Denis (présidente de la FRSEA Normandie), Emmanuel Roch (président de JA Normandie), Guillaume Larchevêque (Chambre d'agriculture Normandie) et Bruno du Mesnildot (Propriété privée 50).
Safer et installation : faire plus grâce à une volonté commune
"Nous avons toute une génération de jeunes à installer. On doit et on peut certainement faire mieux sous condition d'une volonté…
Publicité