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Elevage allaitant
Maîtriser l’infestation des strongles au pâturage

La gestion du parasitisme reste un problème récurrent à chaque période de pâturage.

Les animaux infestés ont une croissance ralentie. Les strongles altèrent le fonctionnement de la caillette. Les retards de croissance qui en découlent ont des conséquences par la suite : broutards qui ont un développement trop lent ou génisses avec un gabarit insuffisant à la mise à la reproduction.
Le développement des strongles ou dynamique d’infestation dépend de l’interrelation entre le parasite, l’animal et le pâturage. Cet article présente quelques rappels sur le cycle de développement, la mise en place de l’immunité et les moyens de lutte préventive et curative.

Une gestion primordiale des strongles dans les deux premières années de vie des bovins
La connaissance du cycle des parasites, des implications, d’une part, de l’immunité de l’animal sur la phase interne et, d’autre part, de la gestion du pâturage et des conditions climatiques sur la phase externe vont permettre d’estimer de façon relativement fiable l’importance et la période du risque parasitaire et, ainsi, déterminer les moyens de contrôles nécessaires. Une gestion adaptée des strongles dans les deux premières années de vie des bovins est primordiale pour deux raisons. Tout d’abord, les animaux jeunes sont très sensibles à ce parasite en raison de leur immunité absente ou insuffisante et l’importante capacité de multiplication des strongles. En l’absence d’immunité, il existe une corrélation linéaire entre la charge parasitaire et la perte zootechnique. Tout retard de croissance enregistré pendant cette période ne sera jamais totalement compensé et les séquelles se traduisant par un moindre développement musculaire et squelettique seront d’autant plus importants que les animaux sont jeunes.

Un cycle en deux phases
Le cycle des strongles (schéma ci-dessous) ne peut s’accomplir que sur des bovins au pâturage avec une phase de multiplication au niveau de l’animal et un rôle de réservoir de la prairie. Les larves infestantes (larves de stade 3 ou L3) fixées sur les brins d’herbe, un fois ingérées par le bovin, évoluent vers le stade adulte après mues successives (L4 puis L5). Les parasites adultes ainsi obtenus vont pondre des oeufs au niveau du tube digestif du bovin et être évacués avec les bouses. En dehors de tout phénomène immunitaire, la période prépatente (délai entre la contamination et la ponte des oeufs) pour les strongles les plus communément rencontrés (Os-tertagia et Cooperia) varie de 16 à 22 jours. Des oeufs de strongles digestifs sont régulièrement rejetés avec les bouses par les bovins parasités, et ce, tout au long de la saison de pâturage. L’oeuf représente une forme de survie du parasite. La rapidité d’évolution de l’oeuf en larve infestante (L3) est fonction des conditions de température, humidité et oxygénation rencontrées dans le milieu extérieur.

Développer l’immunité contre le parasite
- Qu’est ce que l’immunité ?
L’immunité est le mécanisme de défense de l’animal qui se met en place quand ce dernier est en contact avec des parasites (internes ou externes), lors du pâturage ou à l’intérieur des bâtiments d’élevage.
- Comment l’immunité se met-elle en place ?
Pour que les mécanismes immunitaires se mettent en place, il est indispensable que l'animal rentre en contact avec le parasite : on parle alors d'immunité de contact. Cette immunité peut se faire très rapidement, comme pour le cas des strongles pulmonaires chez les bovins, ou peut demander plusieurs semaines dans le cas des strongles digestifs.
Pour que cette immunité soit efficace, elle devra se faire le plus tôt possible dans la saison de pâturage et avec des niveaux d’infestation assez faibles, pour limiter la baisse des performances des animaux.
- Comment entretenir l’immunité ?
Cette immunité sera entretenue grâce à des ré-infestations régulières à de faibles niveaux.
Celle-ci peut se mettre en place sur des animaux jeunes, dès leur première année de pâturage.
L'instauration de l'immunité sur des animaux jeunes sera d'autant plus intéressante qu'elle limitera leur excrétion et donc la contamination des prairies.
Une immunité peut être remise en cause par des traitements mal positionnés.
Tout emploi d’antiparasitaire annule les effets de l’immunité. C’est pour cette raison que chaque traitement doit être raisonné en fonction des objectifs pour chaque catégorie d’animaux et de la gestion des pâturages à venir.

Une immunité pleinement acquise qu’après 18 mois de contact notable
Le stade L3 est le dernier reconnu. Sa détection s’effectue chez des animaux bien immunisés (animaux en deuxième saison de pâture ou adultes) et se traduit par une expulsion massive dès l’entrée dans la caillette. L’implantation est alors inférieure à 1 % des larves ingérées contre 30 à 70 % pour un bovin en primo infestation. L’immunité vis-à-vis d’Ostertagia n’est pleinement acquise qu’après 18 mois de contact notable. Cette immunité est entretenue par le contact parasitaire et disparaît progressivement en son absence (12 à 20 semaines suivant les espèces parasitaires sans contact). Cet élément sera pris en compte dans la gestion des traitements.

Quelques moyens de prévention contre le parasite
- Une bonne connaissance des parasites et de leur évolution
La connaissance du cycle de développement des parasites permet de connaître les périodes d'infestation potentiellement forte par les parasites.
- La gestion du pâturage
• Constituer des lots d’animaux de même catégorie et de même âge permet de gérer le pâturage en fonction de leur sensibilité respective face aux parasites.
• Utiliser des parcelles “saines” (après récolte ou renouvelées) pour certaines catégories d’animaux peut se justifier. Mais en pâturant uniquement ce type de parcelles, les bêtes n’auront pas l’occasion de mettre en place leur immunité.
• Gérer de façon rigoureuse le pâturage : sortir les animaux des parcelles quand l’herbe atteint au minimum 5 cm de hauteur et pratiquer le pâturage tournant qui limite le niveau d’infestation des animaux. La gestion extensive des pâturages sur de grandes parcelles est favorable à l’infestation des animaux qui auront tendance à sur-pâturer les mêmes endroits.
• Complémenter au pâturage quand l’herbe devient moins disponible. Cela permet de diminuer l’ingestion des larves infestantes.
Il faut surtout éviter le sur-pâturage qui engendre des niveaux d’infestation très élevés. L’animal est alors submergé par les parasites et ne peut y faire face. Une mise en contact prolongé, de faible intensité, entre l’animal et les parasites débouche sur une immunité efficace de l’animal.

Les différents traitements disponibles
Plusieurs types de traitement existent sur le marché avec pour chacun des objectifs et des fréquences d'administration différents : voir tableau.
Le type de vermifuge doit également être utilisé en fonction de son type d'action. A titre d'exemple, les vermifuges actifs contre les parasites adultes nécessitent une deuxième administration pour tuer les larves transformées en adultes après le premier traitement. Les vermifuges actifs contre les larves inhibées seront quant à eux préférentiellement utilisés à l'automne.

Quelques recommandations pratiques
- Une approche différente pour les veaux nés en automne et ceux nés en hiver
En 1re année de pâture, pour les veaux présentant une capacité de recyclage à la mise à l’herbe (veaux de 4 mois et plus), il sera mis en place une approche préventive à la mise à l’herbe ou préventive et curative lors du sevrage s’il intervient dans les 3 mois qui suivent cette mise à l’herbe. Pour les veaux de vêlages “ classiques ” de fin d’hiver, un traitement curatif au sevrage est le plus souvent suffisant. En 2e année de pâture, les animaux nés en fin d’année présentent une immunité en fin d’acquisition (s’il y a eu contact suffisant et pas d’excès de traitement, notamment en fin de saison de pâture). Un traitement préventif avec une rémanence de moyenne durée (endectocides pour-on par exemple) sera suffisant. A l’inverse, les bovins de début d’année présenteront une immunité en début d’acquisition, ils nécessiteront une approche préventive à la mise à l’herbe (type bolus par exemple) ou préventive - curative au mois de juin. Le plan de lutte et de prévention intégrera dans son raisonnement les éléments de chargement, de rotation des pâtures, de durée de pâturage, de complémentation alimentaire, conditions météorologiques…

Les traitements systématiques, au mieux inutiles, au pire néfastes, ne sont plus à l’ordre du jour
Mieux gérer le parasitisme en limitant les traitements curatifs est devenu incontournable à bien des égards d’un point de vue :
- économique, en réduisant le coût des intrants médicamenteux ;
- environnemental, en diminuant l’impact des produits et leur persistance dans l’environnement ;
- pratique en limitant les problèmes de résistance aux molécules actuellement employées, et la manipulation - contention des animaux,
- sociétal, en répondant aux préoccupations croissantes du consommateur soucieux de l’impact de son alimentation sur sa santé.

Une démarche raisonnée annuelle
Dans un concept de prescription antiparasitaire spécifique à chaque élevage, avant chaque mise à l’herbe, l’éleveur déterminera, en relation avec le vétérinaire en charge du suivi de son élevage, la stratégie à adopter. Si le parasitisme en stabulation se satisfait de la diagnose des parasites présents et de la mise en évidence de facteurs d’élevage favorisants (alimentation, ambiance, concentration …), les infestations parasitaires de pâturage nécessitent d’appréhender la dynamique d’infestation de l’animal et de la pâture en maîtrisant les trois variables que sont l’hôte, le parasite et l’environnement. Pour être efficace en matière de gestion du risque parasitaire, que ce soit à l’aide de mesures agronomiques ou médicales, deux “rendez-vous” sont incontournables : au printemps pour définir la stratégie à adopter pour la prochaine saison, à l’automne au moment de la rentrée des animaux pour tirer le bilan de la saison passée et mettre en place, si nécessaire, un traitement antiparasitaire curatif adapté. Un rendez-vous facultatif peut advenir en cours ou en fin d’été s’il y a apparition d’un épisode parasitaire clinique ou si des évènements non prévus ont modifié l’exposition des animaux aux parasites.
Patrick CARTOUX
Chambre d’Agriculture de l’Orne
Pour les Réseaux d’Elevage Viande Bovine de Normandie

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