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PAC 2014, PAC 2015, directive nitrate : les réponses de l’Etat

“PAC 2014 -2020 et loi d’avenir de l’agriculture : quelles perspectives d’adaptation pour l’agriculture française”. Tel sera le thème de l’assemblée générale de la FRSEA Basse-Normandie qui se tiendra lundi à Caen en présence de Dominique Barrau, secrétaire général de la FNSEA. Pour nourrir le débat, rencontre avec Jean Cézard, Directeur régional de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Forêt de Basse-Normandie.

Combien les agriculteurs bas-normands vont-ils recevoir en aides directes comparé à l’an passé ?
Comme chacun l'a bien identifié, la réforme de la PAC sera pleinement en application en 2015 ; passage du DPU (droit à paiement unique) au DPB (droit à paiement de base), paiement vert, paiement redistributif, convergence... ne s'appliquent pas en 2014, année de transition. Toutefois les nouvelles règles budgétaires, liées au cadre 2014-2020, s'appliquent d'ores et déjà puisque le cadre antérieur, sorte de loi de finances pluriannuelle au niveau communautaire, ne pouvait être prolongé.
Les paiements 2014 au titre des aides directes seront donc inférieurs à ceux de 2013, de 9% environ en moyenne mais  avec des situations contrastées entre les producteurs.
Cette diminution, liée principalement à celle de l'enveloppe nationale et à un renforcement progressif du 2ème pilier, est toutefois très inférieure à la variation de valeur faciale des DPU que les producteurs ont pu constater au printemps. Le montant effectivement versé sera en effet très proche de la valeur du droit, alors que jusqu'à présent plusieurs ajustements, liés au plafond national et à la modulation notamment, étaient appliqués avant paiement, moyennant un écart sensible entre valeur faciale et montant perçu.

Peut-on espérer une avance au 16 octobre ?
Le principe de l'avance au 16 octobre est maintenu pour cette campagne et ce malgré le travail supplémentaire considérable qui a dû être fourni par les DDT(M) cet été autour de la qualification des surfaces admissibles, que les exploitants auront pu mesurer en partie à travers les sollicitations qui leur ont été adressées. A ce stade et avant même que la période d'instruction ne soit achevée, près de 90% des 18240 dossiers surface de la région sont prêts à être payés. Les services d'économie agricole restent mobilisés pour traiter le faible reliquat et le seront encore jusqu'à la fin de l'année pour permettre le paiement du solde.

Dans le cadre de la réforme de la PAC 2015, les DPU normaux, spéciaux et hors surface vont disparaître et seront remplacés  par des DPB (Droit à Paiement de Base). Quelles sont les modalités de fonctionnement de ce nouveau dispositif ?
Dans les grandes lignes le dispositif sera très proche de l'actuel, si ce n'est que le paiement découplé lié au DPB sera complété, à hauteur d’un tiers du total, par un « paiement vert » sous conditions. Les droits, tous liés au foncier, resteront échangeables entre détenteurs, moyennant un prélèvement réduit, et pourront être complétés via une réserve, par contre moins large qu'aujourd'hui.
L'étape clef de ce nouveau dispositif sera son initialisation, à partir des valeurs de référence des exploitants, notamment les paiements 2014. Les cas particuliers, reprises de foncier, installations, cas de force majeure devront faire l'objet d'une attention très particulière et les exploitants concernés devront se signaler auprès de leur DDT/M.

Quand les agriculteurs bas-normands connaîtront-ils le montant de leurs prochaines aides?
L’initialisation des DPB aura lieu dans le courant de l'année 2015. Le montant total s'appuiera sur les paiements 2014, dont le calcul définitif interviendra courant 2015. Le nombre de DPB sera lié à la surface déclarée en mai 2015.Les nouvelles modalités issues de la réforme auront une application progressive. De ce fait le montant total des aides de chaque exploitant évoluera jusqu'en 2019. Ce montant pourra aussi dépendre, en partie, des choix de l'exploitant liés à certaines productions bénéficiant d'aides couplées, en élevage notamment.
Il n'y a donc pas une réponse unique et définitive à cette question et, tout autant que la valeur 2015, c'est la trajectoire jusqu'en 2019 qui intéressera les exploitants.

Avez-vous prévu un dispositif d’information spécifique pour répondre aux multiples questions que se posent les agricultrices et agriculteurs ?
Le dispositif est inchangé ; les DDT(M) sont le guichet unique de l'administration pour ces questions. Les exploitants connaissent leurs interlocuteurs et savent qu'ils peuvent obtenir des réponses individualisées.
Par ailleurs, une information générale sera diffusée au fur et à mesure, à la fois par les vecteurs habituels d'information, dont ce journal fait partie, ainsi que les sites internet des services de l’État.

Sous quelles conditions et dans quelles formes de dispositif pourront-ils accéder au second pilier ?
Le second pilier évolue lui aussi mais ses fondamentaux demeurent. Il reste notamment le support des aides à l'installation, à la modernisation en vue d'améliorer la compétitivité des exploitations, de l'ICHN revalorisée et des mesures agro-environnementales (MAE), qu'elles soient territorialisées ou abordées dans une globalité de système d'exploitation.
Les modalités des différentes aides sont en cours d'ajustement pour répondre aux premières remarques de la commission européenne. Le Conseil Régional, qui en est maintenant l'autorité de gestion du programme, travaille actuellement en partenariat avec les services de l'Etat pour préciser les conditions d'accès aux mesures, les critères de sélection ou priorisation, les facteurs de modulation des aides. 
Des mesures transitoires existent et ont été mises en œuvre avec succès pour cette année 2014. Nous sommes attachés à ce que le financement puisse se poursuivre début 2015 et maintiendrons notre appui au Conseil Régional pour apporter les réponses réglementaires adaptées.

Globalement, quelles conséquences de cette réforme sur la Ferme bas-normande ?
La nouvelle PAC 2015-2020 instaure le principe de convergence des aides qui vise à réduire progressivement les écarts entre exploitations pour tendre vers une valeur moyenne des DPB.
Le verdissement (intensification de la dimension environnementale du 1er pilier de la PAC) et le paiement redistributif (soutien aux petites structures créatrices de main d’œuvre) constituent les deux autres axes forts de la réforme de la PAC au niveau des aides dîtes découplées.
La nouvelle PAC favorise les exploitations d’élevage plutôt extensives (ndlr : voir encadré).
Les exploitations de Basse-Normandie bénéficient actuellement de DPU supérieurs à la moyenne nationale, générés par l’historique de leurs systèmes de production. Elles sont donc notablement impactées par la convergence des DPB. Ainsi bien que l’objectif de la PAC soit de soutenir l’élevage, les systèmes intensifs lait-maïs et lait-maïs-engraissement de jeunes bovins, majoritaires dans notre région, sont les plus impactées par la baisse des DPB. Néanmoins le système de redistribution aux 52 premiers hectares devrait limiter cet effet pour un grand nombre d'exploitations d'élevage de tailles intermédiaires.
L’impact est différent dans les quelques zones défavorisées de Basse-Normandie (Pays d’Auge du Calvados et de l’Orne, Val d’Orne -14-, Perche-61-, région de Carrouges-61)- pas de ZD dans la Manche où l’ICHN (Indemnité Compensatoire de Handicap Naturel) revalorisée de 15%, majorée d’un équivalent PHAE et intégrant désormais les systèmes laitiers purs, va être bénéfique pour tous les éleveurs et en particulier les laitiers spécialisés des zones concernées.
Au-delà des résultats chiffrés pour les aides, il est important de relever une orientation beaucoup plus profonde et historique de la nouvelle PAC. Qu'on y soit favorable ou non, la réforme de la PAC met la production agricole en relation beaucoup plus directe avec les marchés, européens et mondiaux. La convergence et le découplage des soutiens directs, la fin des quotas laitiers vont dans ce sens.
Même si les aides conservent un effet stabilisateur, en lien avec le terme « garantie » qui figure depuis des décennies dans l'intitulé des fonds, il est significatif de constater que la variation probable des soutiens directs, et l'aide elle-même, sont du même ordre de grandeur que les fluctuations de cours constatées ces dernières années sur les principaux produits agricoles tels que céréales et lait, comme sur les intrants.
Les aides directes de la PAC ne sont donc plus le guide et c'est bien davantage dans des logiques économiques de filières et de débouchés qu'il convient de s'inscrire. Cette situation présente l'avantage de donner des marges de manœuvre plus grandes pour les exploitants et est favorable à la mise en œuvre des principes de l'agroécologie, pour poursuivre un objectif de performance multiple alliant économie, environnement et dimension sociale.
De ce point de vue, la Basse-Normandie ne manque pas d'atouts (contexte pédoclimatique favorable, qualité des produits, statut sanitaire, savoir-faire et compétences des hommes, entreprises de premier plan, image forte du territoire…) pour s'affirmer sur les marchés européens et mondiaux dans les produits de l'élevage (lait et viandes) et de grandes cultures mais également dans un certain nombre de filières régionales d'excellence (légumes, cidre, lin, chevaux…).

La réforme va pénaliser les petites exploitations qui bénéficiaient de montants /ha plus élevés. Quelles pistes de compensation pour ces exploitations utilisatrices de peu d’hectares ?
La convergence sera plus forte pour les DPU de valeur élevée, en effet. À l'inverse les exploitations de taille plus réduite bénéficieront plus fortement du soutien redistributif assis sur les 52 premiers hectares. 60 % des exploitations de la région ont d'ailleurs une SAU inférieure à ce seuil de 52 ha, dont 3 500 exploitations professionnelles. Et bien d'autres, dont la superficie -ou, pour les GAEC, la SAU par associé- excède ce seuil, connaîtront un effet positif de ce paiement redistributif. Cette situation est très fréquente dans les élevages laitiers, dont les DPU sont en effet généralement plus élevés que la moyenne. Ces exploitations sont également directement concernées par le soutien à l'herbe à travers les mesures agroenvironnementales de masse et, pour certaines, l'ICHN revalorisée.

Plus de 3800 communes supplémentaires en France vont être classées en zones vulnérables. Combien en Basse-Normandie et quelles sont-elles?
Le projet de classement concerne 148 communes, principalement réparties dans les deux départements de la  Manche et de l'Orne. A ce stade, il ne s'agit que d'un projet qui a été soumis à la Commission européenne dans l'optique de sortir du contentieux en cours pour lequel nous avons été condamnés une première fois.
Le projet de carte  reste soumis à validation et discussion.

Quel prochain calendrier pour les dates d’épandages des effluents d’élevage? Sera-t-il  variable pour tenir compte de la météo ou complètement figé?
Le 5ème programme d'actions, résultant d'un arrêté préfectoral du 7 juillet 2014, fait évoluer le calendrier, principalement par reprise du calendrier fixé par le programme national (Ndrl : voir calendrier ci-contre).
Ce calendrier tient compte du type d'effluents et des pratiques. Indirectement, les conditions météorologiques peuvent jouer un très léger rôle à travers les dates de récolte et d'implantation des couverts intermédiaires. De plus, au plan pratique, l'épandage est interdit sur sol gelé ou inondé. Il peut également être rendu délicat dans des conditions moins extrêmes.
Enfin, pour tenir compte des conditions climatiques très défavorables, le système de dérogations exceptionnelles accordées par les préfets de département après avis du CODERST est maintenu.

Quelles sont les nouvelles normes de stockage de ces effluents ? Qui est concerné ? Existera-t-il un dispositif d’accompagnement financier ?
Les capacités de stockage des effluents doivent permettre de respecter le calendrier d’interdiction d'épandage, en tenant compte des possibilités et conditions d'épandage. De plus les conditions du stockage doivent, comme aujourd'hui, garantir l'absence de fuite vers le milieu et être gérées correctement.
La règle s'impose à tous les exploitants ayant au moins un bâtiment d'élevage situé en zone vulnérable
Concrètement, le calcul des capacités dépend du type d'effluents, des volumes produits eux-mêmes liés aux types d'animaux et conditions d'élevage, ainsi qu'aux conditions de stockage, et enfin des possibilités d'épandage (surfaces disponibles et surfaces exclues, calendrier lié aux cultures pratiquées sur ces surfaces...).
Cette question est complexe mais des notes détaillées ont été établies avec la DREAL et seront disponibles en téléchargement sur les sites DRAAF et DREAL. De plus, suivant les zones et les situations, des aides financières plus ou moins élevées pourront accompagner l'effort d'adaptation. Ce point est acquis dans les zones nouvellement délimitées et la ministre de l'Écologie a annoncé que les aides iront au maximum permis par la réglementation. Dans les zones actuelles, le ministère de l'Agriculture négocie actuellement avec la commission européenne pour préciser le périmètre et les conditions des soutiens possibles.
Le plus important, pour tous les éleveurs, est de se déclarer auprès de la DDT(M) au moyen d'un formulaire qui sera communiqué et disponible en ligne. Cette déclaration devra impérativement parvenir à la DDT(M) avant le 1er novembre 2014. Je conseille de la déposer dans tous les cas, même si aucune adaptation n'intervient finalement.

La directive 5 prévoit-elle de nouvelles contraintes en terme de gestion des prairies et de gestion des intercultures ?
Sur ce point également une fiche détaillée, spécifique, sera adressée aux exploitants. Le 5ème programme impose des obligations de couverture hivernale des sols, déclinées suivant les zones et surtout la succession culturale. À la marge, cela concerne également le maintien des prairies permanentes, en bordure des cours d'eau et dans les zones d'actions renforcées.
L'objectif est bien sûr de limiter le lessivage de l'azote apporté aux cultures ou présent dans le sol.
Au terme d'une concertation très étroite et constructive, des mesures adaptées aux différentes situations ont pu être trouvées, bien loin parfois des premières propositions théoriques ou génériques qui avaient pu être faites et que les chambres d'agriculture et autres représentants professionnels ont contribué à ajuster aux réalités régionales.

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