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Phillippe Bas : ‘‘ Les Chemins de la République ,,

Pour combattre le découragement, l’indifférence et le scepticisme, Philippe Bas dans « Les Chemins de la République » (Editions Odile Jacob) explore les chemins d’une République retrouvée, vivante, concrète, audacieuse, déterminée et ne laissant personne de côté.

© DR

L’enquête parlementaire sur l’affaire Benalla a éclairé Philippe Bas des projecteurs d’une triste actualité médiatique. Il a fait preuve dans la gestion de ce dossier d’une autorité naturelle et remis le pouvoir politique dans le bon sens. L’occasion de se lancer dans la lecture des 373 pages de son guide de la République. Sous forme d’un abécédaire forcément incomplet, nous vous en proposons quelques extraits.

Administration. « Si vous ne savez plus où donner de la tête face aux difficultés qui s’accumulent dans vos relations avec des administrations muettes ou ésotériques, le maire ou le conseiller départemental sont vos recours les plus naturels. S’ils n’ont pas eux-mêmes la réponse, ils sauront à qui la demander. Il est temps de s’en apercevoir et de valoriser leur rôle au lieu de les accabler de contraintes et de reproches. Ils rendent vivante la République aux yeux des Français. Ils font vivre l’esprit de service ».

Assemblée nationale. « Siéger sans cravate à l’Assemblée nationale ne m’a pas paru être une innovation heureuse même s’il ne s’agit que d’un détail, mais un détail dont la symbolique est dépréciative. La représentation nationale ne peut être débraillée. Le peuple français n’est pas débraillé, il a son orgueil, exige le respect et demande à être représenté avec gravité, sinon avec prestance ».

Bernard Cazeneuve. « Il inspire confiance parce qu’il est modéré et rassurant. Raison de plus pour la droite et le centre de repenser leur stratégie et de redéfinir leur projet ».
Conseil départemental. « J’ai été près de dix ans vice-président puis président du conseil départemental de la Manche. J’y reste présent comme président de la majorité départementale en charge des relations avec les communes. J’ai ainsi la chance d’être un acteur de la démocratie du concret ».

« La force du conseil départemental, c’est la proximité. Dans un département à forte dimension rurale, en particulier dans l’Ouest français, la tradition est souvent celle du conseiller départemental choisi parmi les maires de son canton, sans étiquette politique, inscrivant son action dans une forte dimension de service qui prolonge son mandat municipal ».

Cumul. « J’ai été simultanément président du conseil départemental de la Manche, président de la commission des lois du Sénat, premier adjoint au maire de Saint-Pois (500 habitants) et premier vice-président de la communauté de communes de Villedieu-les-Poêles (18 000 habitants). Est-ce trop ? Partout on dira que oui...., mais je dois à la vérité dire que, localement comme au Parlement, je n’ai pas rencontré de difficultés à exercer ces différentes fonctions qui me sont apparues comme étant non seulement compatibles entre elles mais également complémentaires, parce que mutuellement utiles les unes aux autres. Et de surcroît, j’ai tellement appris ! Ceux qui ont combattu le cumul l’ont sans doute fait de bonne foi, mais en ignorant tout de la réalité concrète de l’exercice des mandats électifs, en fonction de l’idée extérieure qu’ils s’en faisaient, avec une approche plus théorique que pratique ».

« On croit généralement que le cumul est mauvais pour la République. En réalité, c’est exactement l’inverse : le cumul, à condition qu’il reste raisonnable, est utile à la République mais parfois épuisant pour les élus, accaparés par leurs fonctions ainsi que le sont tous les Français qui vivent leur activité comme une passion incandescente. Mais il s’agit là d’un choix personnel qui ne regarde en réalité que ceux qui le font et leur famille ».

Déclaration des droits de l’homme. « Je tiens la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen comme l’un des joyaux de l’histoire de l’Humanité, un chef-d’œuvre de la pensée politique, une référence fondatrice indépassable aujourd’hui encore pour notre état de droit et pour nos institutions. Elle reste le fondement de notre pacte républicain ».

Démocratie. « Il n’y a pas d’alternative sérieuse à la démocratie représentative. Les soviets ont échoué, chacun le sait. Ces temps-ci, on nous rebat les oreilles des votations suisses, que les Français semblent redécouvrir, mais on oublie de dire que leur multiplication, sur des questions dont beaucoup n’intéressent que leurs auteurs, a lassé depuis longtemps les citoyens helvétiques, qui désertent les urnes mais continuent à désigner leurs élus pour administrer par leurs délibérations les affaires de la cité. La démocratie directe n’existe pas et ne peut exister nulle part au monde, sauf comme complément de la démocratie délibérative, représentative, parlementaire ».

« Le lien démocratique entre les citoyens et leurs représentants est fondé sur l’élection, pas sur la représentativité. Supprimez ce lien, vous supprimez la démocratie ».

« Il faut bien sûr éviter que des activistes, éternels recalés du suffrage universel, trouvent un second souffle et de nouvelles capacités d’influence à travers la démocratie participative en attirant sur eux la lumière du débat public ».

Dette. « J’ai été très touché d’entendre l’un de nos concitoyens m’expliquer que le montant de la dette par habitant était égal à la valeur de sa maison, son seul bien ».

Dotations globales. « Les dotations globales dont bénéficient les collectivités ne sont pas des libéralités ou des cadeaux de l’Etat. Elles sont la contrepartie de la suppression d’impôts locaux ou de transferts de charges. Elles sont librement utilisées comme le produit des impôts. Gravées dans le marbre, elles avaient fait l’objet d’un véritable contrat moral avec l’Etat. Or, elles sont aujourd’hui devenues des variables d’ajustement du budget national ».

Electeurs. « Ils n’attendent pas que l’on s’incline mais que l’on assume. Notre automortification donne raison aux démagogues qui construisent leur crédit sur la dénonciation de nos échecs, réels ou supposés, plutôt que sur la sagesse et la pertinence de leurs propositions ».

Elus. « Les élus des Français sont les voix polyphoniques de la République. Seuls, ils défendent un point de vue. Tous ensemble, ils sont la voix de la France, celle des Français dans leur diversité. Cette voix est cependant de plus en plus assourdie. Le lien de représentation démocratique se distend sous l’effet de multiples réformes qui ont affecté les mandats locaux comme les mandats nationaux. Or, sans élus, pas de vraie démocratie ».

Emmanuel Macron. « Il a assis son triomphe sur les ruines de la démocratie de l’alternance, laissant croire que les réformes attendues par le pays étaient à ce prix. Au cours des deux premières années de son quinquennat, il a imposé sa politique avec une verticalité jupitérienne qui ne laisse guère de place au débat, provoquant de violents chocs en retour ».

Europe. « L’Europe, dont nous avons été parmi les principaux bénéficiaires, notamment pour l’agriculture et pour nos exportations, a fini par rassembler une majorité de Français, malgré les réticences constamment exprimées face aux transferts de souveraineté ».

« Ce n’est pas de trop d’Europe dont nous devrions nous plaindre, mais de trop peu ? »

« Une directive européenne doit cesser d’être conçue comme un arrêté préfectoral. L’Europe n’a pas été créée pour calibrer les fruits et légumes, déterminer le volume des chasses d’eau ou fixer la dimension des plaques d’immatriculation ».

« L’Europe doit veiller à ce que les importations venant du reste du monde respectent les mêmes normes sociales et environnementales que celles qu’elle impose à ses propres producteurs, notamment les agriculteurs ».

Gouvernement. « Un gouvernement comme celui d’Edouard Philippe, composé pour les 3/5 de hauts fonctionnaires, de cadres dirigeants du secteur privé et d’anciens membres de cabinets ministériels, présente l’avantage d’agréger des compétences, mais il est aussi d’une grande vulnérabilité sur le chapitre de l’expérience démocratique ».

Islam. « L’islam est une religion qu’il faut respecter, l’islamisme est une idéologie politique incompatible avec la liberté et avec l’égalité, contre laquelle il faut lutter sans aucune inhibition, avec fermeté et détermination. Il me semble indispensable de forger de nouveaux paradigmes pour intégrer l’islam à la République et en refouler l’islamisme ».

Jacques Chirac. « Un président d’une humanité exceptionnelle dont le bilan a, de mon point de vue, été injustement sous-estimé ».

« Jacques Chirac a écrit dans ses mémoires m’avoir choisi comme premier collaborateur en raison de ma très bonne connaissance de la société française, mais c’est en réalité dans la Manche que cette connaissance s’est le plus approfondie, au travers de multiples visages et de multiples expériences humaines ».

Jeunes. « C’est faute d’un ancrage suffisant des formations dans les réalités du monde économique que l’entrée sur le marché du travail est si difficile pour les jeunes ».

Liberté. « Aucune liberté ne peut être supprimée mais aucune ne peut s’imposer aux dépens de toutes les autres ».

Maire. « J’ai entendu le témoignage de nombreux maires qui s’étaient chargés pendant leurs mandats d’être les porteurs des mauvaises nouvelles que personne n’ose annoncer. Ainsi, en 2008, un ancien maire de mon canton élu pour la première fois en 1971, que nous honorions d’un banquet dans son village de 135 habitants, m’a confié que ses souvenirs les plus rudes et les plus forts de 37 ans de mandat étaient d’avoir dépendu 3 suicidés dont un fils suivi de son père 3 mois plus tard ».

Manche. « J’aime la Manche. Elle me correspond et je crois que je lui corresponds aussi. C’est une terre tout en nuances. La mer y est omniprésente, jamais à plus de 45 minutes de chez soi, généralement beaucoup plus proche ».

« C’est la Manche qui creuse inlassablement le même sillon, la Manche rurale avec ses prairies, ses haies, ses collines, ses vallées, ses marais, ses clochers ».
« La rencontre de la terre et de la mer a forgé une culture, marins et paysans se recrutant souvent dans les mêmes familles, la mer prenant les enfants que la terre ne pouvait nourrir ».
Notre-Dame-des-Landes. « La décision d’abandon prise par Edouard Philippe sous l’autorité d’Emmanuel Macron constitue le plus grave renoncement de la République à un projet démocratiquement approuvé, d’intérêt national ».

P’têt ben qu’oui, P’têt ben qu’non : « que l’on prête si facilement aux Normands pour caractériser leur prétendue indécision est un contresens total : les Normands savent en général parfaitement ce qu’ils veulent, ils sont même déterminés et opiniâtres, mais ils ne se dévoilent qu’en confiance, ils sont sensibles aux nuances, ils réfléchissent longuement et ils ont le sens des réalités, qui sont rarement univoques ».

République. « Aujourd’hui, je m’interroge. J’ai le sentiment profond que la République est en train de faire sa mue vers autre chose. Je m’interroge et je m’inquiète aussi. Je vois que ce qui unissait le Peuple français se défait. Et j’ai l’impression que la République se rétrécit comme une peau de chagrin ».

« La République demande beaucoup mais elle donne plus encore. Et personne n’est laissé au bord du chemin. Aujourd’hui, nous croyons être confrontés à une crise économique, sociale, politique et même morale sans précédent alors que notre niveau de vie moyen est parmi les plus élevés du monde, que nous jouissons d’avantages sociaux exceptionnels et que nous bénéficions encore de services publics de grande qualité ».

Retraite. « La sauvegarde des régimes de retraite, en 3 étapes, est due à Edouard Balladur en 1993, à Jacques Chirac en 2003 et à Nicolas Sarkozy en 2008. Dans ce domaine, la gauche n’a jamais rien fait ».

Saint-Pois. « Tous les jeudis matin se tient le marché de Saint-Pois, chef-lieu d’un petit canton du bocage normand comptant 2 900 habitants dont je deviens l’élu en 2008. C’est aussi le matin où le conseiller général recevait en mairie ses concitoyens depuis la IIIe République. Le mercredi soir, j’arrivais donc de la capitale par le Paris-Granville à la gare de Vire où m’attendait  ma vieille Xantia. J’emportais les lourds dossiers qui me permettaient de poursuivre à distance ma tâche au Conseil d’Etat ».

Scolarité. « Je ne brillais pas par mes performances scolaires : pas une classe que je ne manquais d’extrême justesse de redoubler, au prix d’un sursaut de dernière minute en fin d’année scolaire. Ayant obtenu mon baccalauréat à l’oral avec mention passable, j’eus l’outrecuidance de m’inscrire à l’examen d’entrée de l’Institut d’études politiques de Paris. Il fallait 100 points. J’en obtins 101...»

Simone Veil. « Elle a laissé sur moi une empreinte indélébile. Femme d’autorité et de caractère, d’une très grande exigence, bouillante mais exercée à maîtriser (autant que possible) une colère qu’elle connaissait trop bien, ce qu’elle représentait dépassait sa personne et lui interdisait absolument d’échouer ».

Taxe d’habitation. « Le plus inquiétant aujourd’hui est que la suppression progressive de la taxe d’habitation des communes ait pu être décidée en 2017 sans qu’aucune ressource de remplacement ait été préalablement définie, méthode contraire au bon sens et porteuse de lourdes incertitudes pour demain ».

Territoire. « Les territoires ne sont pas à inventer. Ils doivent correspondre à une réalité humaine, une véritable communauté de vie dans laquelle il est naturel de gérer ensemble les affaires communes parce que l’on vit ensemble ». n
Propos recueillis par Th. Guillemot

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