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Projet Eurodairy : de multiples voies de résilience économique et sociale

Caractériser, identifier et promouvoir les différentes voies de résilience, voici la feuille de route que s’est donnée le groupe opérationnel Eurodairy-Résilience normand. Ainsi, depuis le début de l’année, le groupe normand a travaillé à l’évaluation d’un outil permettant de caractériser, de manière rapide et visuelle, la résilience sociale d’une exploitation laitière.

© Julie Pertriaux

D’autres outils, travaillés par les groupes opérationnels des Hauts de  France, sont testés sur les fermes normandes.
Et c’est en groupe, à l’occasion d’un séminaire organisé en Hauts de France les 16 et 17 novembre, que les éleveurs de Normandie, Hauts de France et Rhône Alpes, engagés dans le projet, vont mettre en commun leurs réflexions, leurs analyses et travailler sur les différents outils de caractérisation et vulgarisation de la résilience.

Un nouvel outil pour étudier la résilience sociale

La résilience correspond à la capacité d’un système à faire face à des perturbations extérieures ou intérieures de son équilibre pour perdurer dans le temps. Elle est directement liée au capital économique, physique, naturel et humain mobilisable sur l’exploitation. La résilience sociale a la particularité de placer l’homme au cœur de la réflexion et renvoie à la capacité de chacun à mener une « vie agréable » dans le système dans lequel il évolue.
Puisque le système agricole est géré par l’homme, en période de crise, l’humain est un facteur limitant important. Ce facteur peut être quantifié, analysé et amélioré pour permettre aux agriculteurs de continuer à exercer leur métier dans de bonnes conditions et à l’exploitation de perdurer dans le temps.

Le niveau de résilience sociale des exploitations laitières est la résultante d’un ensemble de critères répartis entre 6 grandes thématiques :

1- ORGANISATION QUOTIDIENNE ET TEMPS LIBRE
- Temps d’astreinte
- Horaires
- Organisation traite
- Administratif
- Temps libre

2 - ORGANISATION COLLECTIVE DU TRAVAIL
- Polyvalence
- Remplaçabilité
- Communication
- Main d’œuvre

3 - BIEN-ETRE PHYSIQUE
- Etat de santé
- Fréquences des accidents
- Prévention des risques

4 - BIEN-ETRE PSYCHIQUE
- Satisfaction
- Charge mentale
- Qualité des relations
- Optimisme
- Temps libre

5 - DYNAMIQUE ET TERRITOIRE
- Isolement
- Proximité services pro
- Densité d’exploitants
- Pression foncière

6 - OUVERTURE
- Prise d’informations
- Implications extérieures
- Contribution à  l’économie locale

Un questionnaire a été réalisé de manière à prendre en compte ces 6 thématiques. Chaque thème a fait l’objet de différentes questions, chacune pondérée, permettant l’obtention finale d’un score. Ce score est ensuite ramené sur 20 et présenté sous forme de radar, facilitant ainsi l’identification des points forts et des points faibles de la performance sociale de l’exploitation.

Résultats des fermes pilotes

Les résultats obtenus avec cet outil sur les fermes pilotes normandes indiquent une très bonne résilience sociale. Ces fermes ont effectivement été sélectionnées au regard de différents éléments, notamment sur l’organisation du travail mise en place par les éleveurs, leur implication sur leur territoire, leur ouverture d’esprit…
L’outil, encore à l’état expérimental, semble donc pondérer de manière satisfaisante les différentes composantes sociales. Ceci étant, il doit désormais être testé auprès d’un plus large panel d’agriculteurs avant sa diffusion.

Des approches économiques comparables
Concernant la partie économique, une multitude d’outils et de méthodes existent pour caractériser la durabilité économique et financière d’une exploitation. Dans le projet Eurodairy, les fermes pilotes auront à mesurer leurs coûts de production, avec la méthode EDF, à deux reprises durant la durée du projet, de manière à permettre une comparaison entre fermes. En Normandie, les coûts de production relatifs à l’année 2016 ont été calculés au printemps avec cette méthode. Le groupe travaille cependant à définir des critères économiques pertinents, faciles à calculer et permettant de quantifier la résilience des exploitations selon leur système mais aussi leur finalité et phase de vie.
Les Hauts de France ont travaillé sur un outil global permettant d’évaluer la résilience d’une exploitation laitière. Cet outil est actuellement en phase de test, y compris dans les fermes normandes.

Des échanges entre groupes pour co-construire
Outils d’évaluation, identification des leviers d’action, témoignages, interventions auprès d’étudiants, voici une longue liste, non exhaustive, au
menu des différents groupes opérationnels français travaillant sur la résilience socio-économique des exploitations.
Cependant, afin de gagner en efficacité et en richesse d’idées, une trentaine d’éleveurs des fermes pilotes vont se retrouver les 16 et 17 novembre, en Hauts de France, pour poursuivre le travail d’échange et de concertation, initié lors du séminaire européen à Annecy en juillet.
L’objectif est de valider une feuille de route partagée au plan national, répartir les actions à mener dans les différents groupes, réaliser des tests croisés afin que, finalement, de multiples voies de résilience soient mises en évidence, caractérisées et diffusées au plus grand nombre d’acteurs.

Témoignage

Emmanuel Plancq

Emmanuel Plancq est parti de zéro pour s’installer. Deux fois. La seconde a été la bonne. Aujourd’hui, il trait une soixantaine de vaches et cultive quelques hectares de céréales à Saint-Hilaire-la-Gérard (61). L’éleveur est engagé dans le projet Eurodairy. Avec d’autres producteurs de lait normands, ils travaillent sur la résilience. Pour Emmanuel Plancq, le bonheur passe d’abord par des animaux en bonne santé.
Emmanuel Plancq, ancien informaticien, avait un rêve de gosse : devenir fermier. « Quand m’a femme m’a dit oui, j’ai foncé », raconte l’homme à la cinquantaine d’années. Il se lance dans un premier Gaec, s’associe avec un couple. Les choses tournent mal, Emmanuel Plancq quitte la société en 2004. « La sortie a été difficile. Je suis parti avec mes vaches et une partie des emprunts sous le bras. J’ai laissé du capital. Mais j’étais libéré des cautions des anciens associés. »

Un système économe et rustique
Pas de quoi abattre l’éleveur, qui re-part de zéro à Saint-Hilaire-la-Gérard. « Je voulais un système économe, avec des animaux dehors toute l’année, et n’avoir à construire un bâtiment que pour la salle de traite. » Mais la banque refuse de financer un modèle qu’elle ne connaît pas. Emmanuel Plancq reste dans les clous et emprunte pour faire le bâtiment vaches laitières.
L’éleveur maintient le cap de la rusticité. Il croise ses Prim’Holsteins avec la Brune des Alpes. Le changement de race s’opère par absorption. Il développe, au maximum, l’herbe dans la ration. « J’ai la chance d’avoir un îlot de 70 ha autour de l’exploitation, sans route à traverser. Je vais doucement vers un système tout herbe. » Emmanuel Plancq a terminé sa conversion bio pour le lait il y a quelques jours.

Réfléchir avant d’agir
Groupe lait, commune, associations privée et professionnelle, association de patrimoine sont autant d’entités dans lesquelles Emmanuel Plancq est engagé. Et depuis un an, le projet Eurodairy (lire ci-contre- s’ajoute à la liste. « Je suis curieux, j’ai envie d’ouverture et d’échange. » Les éleveurs normands, engagés dans Eurodairy, travaillent sur la résilience (capacité à résister aux aléas et rebondir pour continuer à produire) sociale, économique et environnementale. Chez Emmanuel Plancq, la résilience passe par l’utilisation de ce dont il dispose : ressources foncières, animales, humaines et environnementales. Il a composé avec les particularités de son exploitation, se pose les bonnes questions avant d’agir et s’inspire des différents modèles existants pour faire perdurer le sien.

Zéro
Lors de la dernière réunion Eurodairy, ils étaient une quinzaine à réfléchir à « comment définir les objectifs d’un éleveur ? » « Pour beaucoup, se souvient-il, la réponse a été gagner sa vie, être en phase avec la société. Pour certains, c’est avoir des animaux en bonne santé. » Les acteurs du projet étaient réunis chez Emmanuel Plancq, qui a présenté son exploitation : entre 50 et 70 vaches au tank, des vêlages groupés au printemps, une ration qui coûte moins de 50 euros par an pour 1 000 l, 18 ha de céréales maïs et méteil, une production de 5 400 l par vache. La dernière fois qu’il a acheté un traitement pour les mammites, c’était en novembre 2016. « Je n’ai toujours pas ouvert la boîte. Je n’ai pas d’animaux malades. C’est du bonheur pour moi. »

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