Transformation à la ferme
Qualités sanitaires et organoleptiques dans la boîte
Transformation à la ferme
"On travaille sérieusement tous les jours pour ne pas provoquer l’erreur". Christine et Samuel Brostin chouchoutent au quotidien leurs camemberts au lait cru.

Samuel et Christine Brostin ont fait le choix de la race Normande avec herbe comme plat principal. Une vingtaine de vaches pour un quota de 80 000 litres.
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TG

Christine qui refuse <i>"de vendre à tout prix" </i>joue d’ailleurs la transparence avec ses consommateurs.

Il y a obligation de résultats et la réglementation fixe des objectifs mais les producteurs ont le choix des armes

Olivier Desriac (DDSV 50) et Anne Manach (chargée de mission Produits fermiers et du terroir à la Chambre d’Agriculture de la Manche) : "le Paquet hygiène pose la séparation claire des responsabilités entre opérateurs et autorités de contrôle et la fixation par la réglementation d’objectifs à atteindre en laissant aux professionnels le choix des moyens".
Lui est électromécanicien de formation. Elle, BTS agroalimentaire option "Laiterie" en poche, a roulé sa bosse dans différentes usines laitières de la région. De leurs union et passion communes et outre 3 enfants, est née une fromagerie artisanale d’où sortent par an 12 000 à 14 000 camemberts au lait cru. Christine et Samuel Brostin, producteurs de lait à Le Theil dans le Val de Saire (Manche), sont aussi transformateurs et commerçants.Le "Moulin des Corvées"
La ferme s’appelle "Le Moulin des Corvées". Mais le temps des corvées, c’était l’époque où Christine et Samuel travaillaient à l’extérieur. Certes, depuis qu’ils ont repris l’exploitation familiale en octobre 1998, ils alignent les heures. Quand Samuel part le matin faire son marché, il en a déjà plusieurs au compteur (traite des vaches, soins aux élèves...). Et puis il y a eu la fromagerie à penser (5 plans successifs) et faire sortir de terre : 9 mois de travaux dont beaucoup d’auto-construction pour un investissement de 148 000 e environ. Le premier fromage a été fabriqué le 23 août 1999 mais il a fallu attendre décembre pour lancer la commercialisation. "Le camembert est un produit vivant, compliqué,"assure Christine. Il faut se faire au métier et prendre le temps d’acquérir le tour de main". Il est vrai que le lait change, notamment en fonction des saisons et de l’alimentation. Il faut donc de l’expérience pour arriver à une bonne stabilité du produit fini et ne pas ainsi perturber le consommateur. Cette qualité organoleptique, les Brostin la maîtrisent aujourd’hui. Pour preuve, ils fournissent des maisons ayant pignon sur rue comme "Le Bouquet de Cosqueville" (restaurant) et un magasin de produits de terroir renommé à Martinvast. Mais il est un autre défi à relever : celui de la qualité sanitaire. D’autant plus quand on travaille avec du lait cru. Christine qui refuse "de vendre à tout prix" joue d’ailleurs la transparence avec ses consommateurs. Elle n’hésite pas à informer les femmes enceintes et les mères d’enfants en bas âge de la nature du produit.
Aucun accident significatif à ce jour mais "le risque zéro n’existe pas, reconnaissent nos fromagers qui ont tout investi dans l’affaire. S’il nous arrivait un pépin, nous aurions très peu de chance de nous en sortir". Pas d’angoisse pour autant au "Moulin des Corvées". "On travaille sérieusement tous les jours. Il ne faut pas provoquer l’erreur", juge simplement Christine. Et il suffit de faire le tour de l’outil de transformation pour s’apercevoir que les actes sont conformes au discours.Le défi sanitaire
Dans ce combat sanitaire, ils ne sont pas seuls. La DDSV (Direction Départementale des Services Vétérinaires), bien que gendarme, joue un rôle d’information. Le plan de maîtrise sanitaire (lire ci-dessous) élaboré par nos éleveurs prévoit notamment une analyse mensuelle par le LDA (Laboratoire Départemental d’Analyse) pour un coût annuel de 2 000 e environ. Ils ont également contractualisé avec le GDS (Groupement de Défense Sanitaire) dans le cadre d’analyses sur les matières premières.
Enfin leur laiterie (Les Maîtres Laitiers du Cotentin), à qui ils livrent le surplus de leur production assure les comptages en germes et cellules. L’ensemble du dispositif représente un coût (le Conseil régional et l’interprofession laitière apportent cependant une aide) mais constitue un passage obligé pour obtenir l’agrément sanitaire.
Il peut sembler parallèlement et "administrativement" contraignant. Cependant, les exigences en terme de traçabilité, mais aussi la garantie qu’elle apporte sur le plan de la sécurisation du consommateur, supposent un process d’enregistrement sans faille.
"Il y a obligation de résultats et la réglementation fixe des objectifs mais les producteurs ont le choix des armes", pondère Olivier Desriac, technicien du service sécurité sanitaire des aliments en charge des produits laitiers à la DDSV. Christine ne "ronchonne" d’ailleurs qu’avec le sourire. Pourtant formée à l’HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point), un outil clé de la prévention dans les entreprises alimentaires, elle estime encore manquer de connaissances en bactériologie. Elle en redemande!
Th. Guillemot
ContactLe "Paquet hygiène" pour prévenir