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Porc
Recréer de la dynamique et de la concurrence en jouant la carte du cadran

Ne plus apporter ses porcs à l’abattoir mais les vendre au cadran. Un souhait formulé par Patrick Julien à tous ses collègues éleveurs de porcs.

Eleveur de porcs à Banvou (61) depuis 1992, Patrick Julien reconnaît qu’il traverse “la crise la plus dure et la plus longue que j’ai connue”. Une crise qui a modifié certains de ses comportements comme son approche commerciale.

Le cadran pour la première fois
Avant, j’avais pour habitude de mettre mes porcs à l’abattoir. Jeudi dernier, je les ai proposés au cadran. Mon abattoir ne les a pas pris. C’est un autre qui les a achetés”. Une petite phrase presque sibylline mais que Patrick Julien lie “à une démarche philosophique. Mon souhait ! Ma revendication !”. Le poids des mots. D’une démarche où l’éleveur apporte ses porcs que l’abattoir réceptionne, revenir aux fondamentaux en quelque sorte. L’éleveur élève et vend, l’abattoir achète. “Il faut recréer de la dynamique et de la concurrence. Nous devons modifier nos comportements!”, insiste notre éleveur. Certes pas de façon radicale. Il ne s’agit de faire passer tous les porcs français par Plérin mais de remettre un peu d’ouvrage sur le métier. D’enfoncer parfois un coin dans des habitudes ou des partenariats trop figés. “Il y avait 19 groupements porcs dans l’Orne il y a 10 ans. Il n’en reste plus que 4. Ce n’est pas forcément mieux”.

800 truies en moins dans l’Orne en 18 mois
Ce n’est certes pas le cadran qui sauvera le cochon. Patrick Julien n’a d’ailleurs pas la semaine dernière vendu ses porcs plus cher. Le cadran affiche en ce moment 1 e et des broutilles alors que le seuil de rentabilité s’articule autour de 1,35 e. Alors, après 18 mois de crise, la question de la pérennité même de la production porcine en France et plus particulièrement dans l’Orne mérite d’être posée. 
Depuis le début de la crise, on a perdu dans le département 8 élevages de truies soit 800 têtes sur un total de 9 500. Ça fait presque 10 %. Ce n’est pas rien”, juge notre éleveur. Début ou fin de l’hémorragie ? Il faudra attendre la sortie de crise pour faire les comptes mais d’autres éléments sont à prendre en compte. Un grand nombre d’éleveurs ornais se situe dans la tranche d’âge 50/60 ans. Ils ont les yeux rivés sur la date couperet du 31 décembre 2012 avec son obligation de mise aux normes. “80 % des élevages ne le sont pas. Un investissement de l’ordre de 100 000 e pour un élevage moyen soit 5 cts/kg. J’ai peur que beaucoup ne franchissent pas ce cap”, s’inquiète Patrick Julien. Une mise aux normes qui arrive à le faire sourire, lui qui y est passé. A la question : “vos truies sont-elles plus heureuses aujourd’hui ?” Il répond non sans malice : “demandez leur !” Et le plus étonnant, c’est qu’elles vous répondent. Dans leurs cases collectives, 80 % des truies occupent leur emplacement privé même quand elles ne mangent pas. A croire qu’on a voulu faire le bonheur des cochons sans tenir compte de leur avis!

Une crise qui dure et perdure
Le secteur porcin a traversé de multiples crises. La particularité de celle en cours, c’est qu’elle dure et perdure. L’envolée du prix des céréales en septembre 2007 a provoqué la première salve. “Le 1er semestre 2008 a été terrible en terme de rentabilité. Nous étions à 30, voire 40 centimes, en dessous de nos coûts de production. Nos trésoreries ont été plombées en 6 mois”, se souvient Patrick Julien. Depuis, le prix de l’aliment s’est quelque peu normalisé mais les cours du porc ne couvrent toujours pas les coûts de production. “1 % de consommation en moins, ça fait chuter les prix de 10 %”. Le porc n’est toujours pas rentable et les ouvertures de crédits s’additionnent. “Combien de casse à terme ?”, s’interroge notre éleveur. Pour entrevoir le bout du tunnel et parce que le marché du porc est en équilibre précaire, il faudrait une baisse de la production pour espérer une augmentation des cours. 
C’est ce qui se passait auparavant. A chaque crise, certains décrochaient définitivement. La production reculait, les cours remontaient. Mais la donne a considérablement évolué. Les producteurs de porcs sont de plus en plus spécialisés. Ceux qui ont investi ne peuvent pas se permettre d’arrêter. La variable d’ajustement n’existe quasiment plus. Les quelques arrêts d’ateliers ici ou là ne pèsent pas de façon significative en terme de volume quand on analyse la situation du point de vue macro économique.

Y croire malgré tout
Patrick ne sombre pas pour autant dans la sinistrose. “Bien sûr qu’un jour on sortira de cette crise. Ne serait-ce que parce ce qu’il y a des abattoirs et des entreprises à faire tourner”. D’autres éléments tangibles plaident en faveur du porc. Patrick Julien est aussi producteur de lait (300 000 litres de quota) et il a de la mémoire. Quand le prix du cochon était rémunérateur, ça lui a permis de supporter la mise aux nomes Bovins. Quand le prix du lait était à 400 e, il a pu supporter la mise aux normes Porcins. Par ailleurs, lait et porc lui permettent de consolider l’emploi (1,5 salarié) sur son exploitation. 
Patrick Julien continuera donc  à ouvrir les portes de sa porcherie dans le cadre du réseau ARIP. “Je reçois tous les ans entre 50 et 200 visiteurs qui n’avaient auparavant jamais vu la queue d’un cochon. Ils repartent enchantés”. Vraiment tout est bon dans le cochon sauf une certaine rentabilité économique qui se fait trop attendre.

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