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Le veau dans la tourmente
Sauver le veau comme on l’a fait pour l’agneau

À la veille de la Pentecôte, la filière veau est très inquiète. Malgré une communication équivalente à celle qui a sauvé l’agneau de Pâques, la reprise n‘est pas là et les prix sont en chute libre. À l’étal, pourtant, ils n’ont pas bougé. Entre colère et espoirs de reprise, les acteurs témoignent.

ELEVAGE VEAUX
© FRANCK MECHEKOUR

L’interview d'Angélique Delaire, éleveuse à Augerolles (Puy-de-Dôme) et vice-présidente de la Fédération nationale bovine (FNB).

" La cotation du veau gras s’effondre "

Dans un communiqué daté du lundi 18 mai, la FNB dénonçait le manque d’implication des distributeurs dans la valorisation du veau à la veille de la Pentecôte. La filière se trouve dans une situation très difficile avec des veaux qui sont maintenus dans les fermes et des prix très bas.

>> La FNB indique une baisse de 13,5% des abattages de veau et dénonce le manque d’implication des magasins dans la promotion du veau, pourquoi ?
La grande distribution a annoncé qu’elle mettrait en place pour le veau de Pentecôte la même opération que l’agneau à Pâques. Les semaines passent et on ne voit pas grand-chose. On constate au contraire en magasin que le veau est très peu accessible. Il y a peu de barquettes, sans aucune mise en valeur. L’interprofession a fait l’effort, avec une campagne publicitaire du 14 au 24 avril, de faire la promotion du veau, mais si le consommateur ne le trouve pas en rayon, ça ne sert à rien. Au final, on fait des mécontents.

>> Quelles sont les actions de la profession pour la Pentecôte ?
Interbev propose aux magasins un kit de promotion aux couleurs de la Pentecôte. Nous avons même remis en service des bacs réfrigérés customisés, mais ça a été très compliqué de les faire commander aux magasins. Habituellement, nous organisons des actions avec des éleveurs, ça fonctionne très bien. Le consommateur n’achète pas spontanément du veau, il a besoin qu’on lui donne l’idée. Quand on le fait, on en vend bien. Nous avons ajouté cette campagne de publicité à nos actions traditionnelles pour la Pentecôte parce que nous ne pouvons pas venir en magasin.

>> Quelle est la situation des éleveurs depuis le 17 mars ?
La cotation du veau gras s’effondre. Nous sommes privés de nos débouchés traditionnels, restaurants, cantines d’entreprises, etc.
La restauration hors domicile représente 20% de notre écoulement. On a aussi perdu les bouchers attenants aux marchés qui ont été longtemps fermés. On se retrouve avec un gros client, la GMS. Les artisans bouchers restés ouverts nous le disent : en faisant de la promotion, ils vendent du veau, c’est donc possible.

>> Quelle est la solution pour les éleveurs dont les veaux ne sont pas vendus ?
Les éleveurs assurent une durée plus longue d’engraissement. Les charges de production sont donc plus élevées. On adapte l’itinéraire technique et on retravaille le plan d’alimentation pour sortir la même qualité de viande. En général, un veau est élevé entre 20 et 25 semaines. Là, on arrive à la limite d’âge des huit mois.

>> La FNB dénonce une baisse de 16% du produit annuel brut des éleveurs sur 2020 par rapport à 2019. Pour quelles raisons ?
L’allongement de la durée d’élevage nous oblige à diminuer notre production sur l’année, puisque nous devons respecter un vide sanitaire entre deux lots. Nous subissons une diminution de notre production annuelle en nombre de veaux. Notre revenu est impacté. Nos bâtiments sont conçus pour un certain nombre d’animaux, ce qui nous permet de les amortir.

 

L’interview de Sébastien Augé, responsable du pôle Intégration - achat veaux chez Denkavit

" Les ventes de veaux repartent difficilement "

>> Que s’est-il passé sur le marché du veau depuis le début de la crise le 17 mars ?
La semaine 12 a été euphorique au niveau de la vente de veaux gras. Malgré la fermeture de la RHD et des collectivités, on imaginait pouvoir tirer notre épingle du jeu, mais malheureusement, la semaine 13 a été tout autre… Les volumes ont chuté fortement. Depuis, ils n’ont cessé de descendre. Ça a commencé par les veaux laitiers et, depuis 3 semaines, toutes les catégories ont fortement baissé.
Et pourtant, à l’étal les prix ne bougent pas, ni en GMS, ni en boucherie traditionnelle…

>> Quel mot d’ordre a été donné aux éleveurs pour faire face à cette situation ?
La chute des abattages a contribué à rallonger de deux semaines les durées d’engraissement et techniquement cela impose des adaptations. Nos techniciens qui suivent les élevages ont été sensibilisés pour adapter les plans d’alimentation et éviter que les carcasses s’alourdissent anormalement et n’engorgent encore plus le marché. Pour les éleveurs-engraisseurs, c’est également compliqué, car en finition, les veaux demandent plus de travail et consomment plus d’énergie.

>> La congélation pourrait-elle être une option ?
La congélation qui aurait pu être une solution n’a pas été retenue par les « instances gouvernementales », car le veau de boucherie n’est pas éligible. Des solutions sont possibles au niveau du stockage privé, mais vraiment en dernier recours compte tenu du coût très élevé du stockage et des prix de vente inconnus.

>> Comment vivez-vous la situation ?
Avec une baisse d’abattage de l’ordre de 30/35% et des prix très bas, il est difficile de trouver de la rentabilité. L’intégration de veaux de boucherie sortait d’une crise due à une surproduction mondiale en 2019 et replonge tout droit dans une crise de même ampleur sous l’effet de la situation liée au coronavirus. Cependant, Denkavit France souhaite rester leader dans son domaine en honorant ses contrats et en gardant la confiance de ses éleveurs intégrés.

>> Avez-vous une idée d’un possible redémarrage ?
Malgré quelques mises en avant sur le veau de boucherie, promotions et publicités n’ont pas eu les effets escomptés sur les ventes qui repartent difficilement. Mais si tout le monde est prudent, on peut imaginer des jours meilleurs vers la fin d’année.

 

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