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Fourrage
Silo d’herbe : soyez conservateur

Le printemps arrive et les chantiers d’ensilage d’herbe peuvent démarrer d’ici un mois.

Un point sur les silos d’herbe, réalisé au cours de l’hiver dernier montre que plus de 40 % des silos sont mal conservés. Améliorer la conservation des ensilages d’herbe est une nécessité dans de nombreux élevages. Un ensilage bien conservé représente un fourrage intéressant, y compris pour des vaches laitières.

Près d’un silo sur deux est mal conservé dans le Calvados
Une enquête a été réalisée par les Chambres d’agriculture et les Contrôle laitier de Normandie sur 23 silos d’herbe début 2010. Ces silos, utilisés pour les vaches laitières, sont mal conservés dans 44 % des cas en prenant en compte la matière sèche et le pH.
Le pH trop élevé est corrélé positivement avec les teneurs en acide butyrique, le risque butyrique est donc très présent dans le lait produit avec ces ensilages (Graphique 1).

Les fondamentaux pour un ensilage réussi
- Le stade de récolte est primordial : récolté précocement, le fourrage est plus riche en sucres solubles, support indispensable à une bonne conservation (avant la pleine épiaison des graminées ou le début floraison des légumineuses). Les valeurs UF et PDI sont aussi plus proches du fourrage vert.
- La hauteur de coupe est la garante de la propreté du fourrage. Une fauche à 7cm limite l’introduction de terre et donc la baisse de la valeur UFL. C’est aussi une assurance contre l’introduction de spores butyriques dans le silo. Enfin, couper haut améliore la vitesse de séchage (andains plus aérés), permet une repousse plus rapide et améliore la pérennité des plantes comme la luzerne
- La finesse de hachage de 2 à 3 cm libère plus facilement les sucres et permet un tassement correct du silo, une bonne ingestion. La moindre valeur au kilo de MS, liée à un séjour au sol plus long, est plus que compensée par une ingestion supérieure
- Le taux de matière sèche idéal est de 30 à 40 %. Il garantit plus facilement la conservation et l’ingestion par les animaux.

Limiter les pertes par rapport au fourrage vert
La recherche du compromis entre rendement, valeur alimentaire et bonne conservation au silo amène à faire des choix.
- Les pertes mécaniques au champ dépendent surtout du nombre de fanages. La recherche d’un fort taux de matière sèche (plus de 40 %) avec des fanages répétés engendre plus de pertes. Le type de matériel (pirouette, andaineur) et son utilisation jouent sur ces pertes.
- Les conditions météorologiques priment sur la date : si une fenêtre météo est favorable fin avril ou début mai, il faut en profiter. Sinon, le risque est de retarder largement la récolte comme en 2009 avec des chantiers de fin mai en conditions humides.
- Les pertes par jus sont importantes pour les ensilages à moins de 25% de matière sèche.
- Les pertes dues aux mauvaises fermentations sont les moins visibles mais les plus marquantes : mal conservé, un ensilage sera moins bien ingéré, sa valeur UF et surtout PDIE sera dégradée. En effet, les fermentations ont pour conséquence une solubilisation des protéines : elles sont dégradées jusqu’au stade acides aminés et ammoniac. Ainsi pour un ensilage mal conservé, l’essentiel de l’azote est présent sous forme soluble, diminuant les valeurs PDIA et PDIE du fourrage (25à 30% de moins que du fourrage vert).

Un silo, comment ça marche ?
Plusieurs phases se succèdent lors de la conservation.
1-Respiration. Juste après la mise en silo, si le taux de matière sèche est inférieur à 50 %, la plante est vivante, respire encore et produit du gaz carbonique, de l’eau de la chaleur. Une récolte avec un taux de matière sèche élevé et la fermeture rapide et hermétique du silo va réduire la durée de cette phase qui consomme des sucres nécessaires à la bonne conservation.
2-Fermentation. Un gramme d’herbe verte contient plusieurs millions de micro organismes (bactéries, enzymes). Ils se développent en consommant les sucres solubles. Avec le manque d’oxygène, les bactéries anaérobies, qui ne sont pas majoritaires au départ, vont se développer, en 8 jours si les conditions sont favorables pour atteindre plusieurs milliards par gramme. Ce sont les bactéries lactiques, peu présentes au départ qui sont le plus efficaces pour abaisser le pH et éliminer les autres bactéries indésirables. Ensiler, c’est donc favoriser le développement des bactéries lactiques avec deux conditions : absence d’oxygène et présence suffisante de sucres. 
3-Stabilisation. Avec suffisamment de sucres dans la plante et un silo hermétique les bactéries lactiques vont rapidement baisser le pH du silo en dessous d’un seuil où toute fermentation sera inhibée ; développement et activité microbienne seront alors stoppés.
Faute de stabilisation rapide, d’autres bactéries, essentiellement les butyriques vont s’en donner à cœur joie pour dégrader le fourrage et contaminer le silo en butyriques. 
4-Post fermentation. A l’ouverture du silo, le fourrage se retrouve à nouveau en présence d’oxygène et les fermentations reprennent au front d’attaque. Les ensilages très pré fanés sont notamment sensibles à cette reprise due à des moisissures ou des levures.

Avancer suffisamment lors de la reprise
L’avancement du silo devrait être au minimum de 1 mètre par semaine pour éviter les reprises de fermentations au front d’attaque. Il serait dommage de bien conserver un ensilage et qu’il se dégrade ensuite faute d’avancement suffisant (tableau 1).
Pour un troupeau de 50 vaches qui reçoivent 4 kg MS/jour d’ensilage d’herbe, il convient de désiler environ 1 m3 par jour. Pour un silo de 1,5 m de haut et un avancement de 15 cm par jour, le silo ne devrait pas dépasser 4,5 m de large! Or la plupart des silos en font le double. La distribution à deux lots de 17 élèves, un lot en premier hivernage, l'autre en deuxième, permet d’atteindre la vitesse d’avancement optimale pour un silo de 9 m de large.
Avec l’utilisation d’une griffe qui “ébranle” le silo (entrées d’air) et qui laisse un front d’attaque irrégulier (surface plus importante en contact de l’air), les risques de reprise de fermentation sont grands.

Le conservateur pour limiter les pertes
L’utilisation d’un conservateur est très peu répandue. Si le conservateur ne rattrape pas de mauvaises conditions d’ensilage (humidité, incorporation de terre, fourrages pauvres en sucres, ..), il offre une garantie de maintien des valeurs alimentaires, notamment une bonne ingestion. Les spécialités récentes permettent aussi de limiter l’échauffement au front d’attaque.
Ainsi, pour une production de 25 kg de lait, une ration 100 % ensilage d’herbe avec conservateur permet d’économiser 1 kg de céréale à 130 €/t et 0,5 kg de tourteau de colza tanné à 200 €/t, comparée au même ensilage sans conservateur. Le montant économisé sur le concentré est de 0,23 €/ration de 15 kg de MS. Pour être rentable, le coût du conservateur ne doit pas dépassé 4,6 € par tonne de vert à 30 % de MS. Or, les conservateurs classiques amènent à un coût de 1,8 à 3 € par tonne de vert. Il est remboursé au moins 2 fois. 
Les conservateurs sont recommandés sauf dans un seul cas : un fourrage jeune, riche en sucre et un taux de matière sèche entre 35 et 45 %.
Les conservateurs acides sont utiles quand les taux de matière sèche sont bas (moins de 25 %) ou quand les fourrages sont âgés et pauvres en sucres.
Dans les autres situations (25 à 45 % MS), les conservateurs biologiques sont utilisables : les plus efficaces sont ceux qui associent plusieurs souches de bactéries lactiques qui ont des propriétés différentes ainsi que des enzymes comme la cellulase.
Il est aussi possible d’utiliser du tannin de châtaignier comme conservateur d’ensilage. Il apparaît être efficace à 2 à 3 kg/ tonne de MS sur les fourrages pauvres en sucres (dactyle, luzerne).

Bactéries lactiques : homo ou hétéro ?
Les bactéries homo fermentaires sont constituées par des souches de bactéries lactiques, qui sont utilisées pour produire rapidement de l’acide lactique après la fermeture du silo, ce qui va faire baisser le pH. Cette utilisation est à réserver pour des ensilages avec des teneurs en matière sèche entre 25 et 40 %.
Les bactéries hétéro fermentaires sont aussi des bactéries lactiques qui ont la capacité de produire non seulement de l’acide lactique mais aussi de l’acide acétique et propionique qui ont pour effet de freiner le développement des post fermentations. Cependant leur production d’acide lactique est moindre que les souches homo fermentaires. A réserver pour des ensilages à plus de 40 % de matière sèche et (ou) avec des silos qui avancent de moins d’un mètre par semaine l’hiver.
Vous pouvez consulter la liste des conservateurs homologués sur le site :        http://e-phy.agriculture.gouv.fr/, rubrique usage (prairies permanentes, graminées, légumineuses,..) ou demander à votre technicien.

Jean-Jacques Beauchamp
pour le groupe alimentation de Normandie

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