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Un déplacement "Royale" dans l'Orne

Lundi dernier, en venant inaugurer la route solaire, Ségolène Royal, ministre de l’Environnement, s’est déplacée sur l’exploitation de la famille Lejeanne, installée à Moussonvilliers pour évoquer la méthanisation. La FDSEA et les JA en ont profité pour défendre d’autres particularités du département.

© SB

Anne-Marie Denis avait sollicité une rencontre avec la ministre de l’Environnement, Ségolène Royal, à plusieurs reprises. En juillet dernier, quand elle s’est déplacée dans l’Orne, elle avait été reçue par Philippe Bodenez, conseiller prévention des risques chimiques et technologiques, santé, sûreté nucléaire, économie circulaire, déchets, de la ministre. Cette fois-ci, le conseiller technique est toujours présent, mais avec la ministre, venue inaugurer la route solaire à Tourouvre. Une entrevue décrochée la veille après de multiples échanges, mais qui aura duré plus d’une heure.

Limiter les odeurs
Cette rencontre était axée sur la méthanisation, avec comme exemple le Gaec Lejeanne, installé à Moussonvilliers. Les parents sont exploitants depuis le début des années 80. En 2006, les deux fils ont repris une exploitation à 5 km. Et en 2009, les quatre membres de la famille ont formé un Gaec de 515 ha, 125 vaches laitières et une production laitière de 1,2 million de litres de lait. Deux ans après, l’unité de méthanisation voyait le jour. Un investissement au total de 1,5 million d’euros guidé par plusieurs raisons. « La première était la réduction des odeurs » assure un des fils, Maxime Lejeanne. « Avec le digestat, c’est totalement différent ». Et pour la famille Lejeanne, c’est à la fois une production indépendante de la PAC, et de la météo, et qui assure un revenu stable. Des raisons suffisantes pour se lancer et pour n’avoir aucun regret cinq ans plus tard.

Chauffer 500 maisons
Dans cette unité de méthanisation sont incorporés les effluents agricoles. « Le lisier et le fumier représentent 60 % des apports » indique Philippe Lejeanne, auxquels s’ajoutent les pelouses des collectivités, des paysagistes, des déchets de céréales… Au final, le retour sur investissement est estimé à moins de 10 ans. Le revenu dégagé se fait grâce à la vente d’énergie à 100 %. Quant à la chaleur, elle permet d’alimenter trois maisons, de chauffer l’eau de l’exploitation, de sécher du fourrage... Et le digestat est utilisé comme engrais. Au total, cette unité de méthanisation produit le chauffage pour 500 maisons. Certes, les agriculteurs sont satisfaits et convaincus de leur investissement. Pour autant, ils n’ont pas été sans rencontrer quelques difficultés. Face à la ministre de l’Environnement, Philippe Lejeanne comme la FDSEA et les JA de l’Orne ont voulu remettre sur la table quelques interrogations pour tenter de faire bouger les lignes de la réglementation.

Assurer un prix pour les nouveaux projets
A commencer sur les tarifs. Certes, c’est une production qui garantit un tarif à long terme. Encore faut-il que les tarifs sécurisent les investissements. Au Gaec Lejeanne, le prix est passé de 15 à 20 centimes/kwatt « parce que notre installation date de 2006, » note Maxime Lejeanne. Pourtant Ségolène rappelle l’arrêté signé en septembre dernier prolongeant le tarif d’achat pour les installations existantes dans l’attente de la publication du nouvel arrêté tarifaire. C’est bien le cas. Mais quid pour les nouveaux projets, « il n’y a aucune projection possible » se désole le fils Lejeanne. « C’est toute une filière qui est impactée. La France n’a pas pris la même dynamique que l’Allemagne. Alors qu’en France on compte 236 unités de méthanisation, en Allemagne, il y en a 8 700 ! ».

Le digestat n’est pas un lisier
Toujours au sujet de la méthanisation, les deux syndicats agricoles préconisent une réglementation adaptée à propos des déchets, qui sont en fait des sous-produits. « Le mot déchet fait peur ,» note Anne-Marie Denis, présidente de la FDSEA de l’Orne. Quant à l’épandage, la profession agricole préconise des distances moins importantes en terme d’épandage sachant que le digestat dégage beaucoup moins d’odeurs. « Or, il est considéré comme du lisier » dénonce la présidente syndicale. Et pour trouver la solution la plus adéquate, elle préconise à la ministre de réaliser des expérimentations sur le terrain. Ce à quoi, la membre du gouvernement n’a pas été totalement fermée. « A force d’imposer des distances, nous ne pourrons plus rien faire dans nos champs » se désole Philippe Lejeanne. Reste également l’enfouissement qui sur des cultures est audible, mais pas sur des prairies. Reste l’aspect financier qui bloque les banques à prêter pour se lancer dans de tels investissements. Et restent les coûts et délais de raccordements électriques… La ministre est repartie avec du travail. Les agriculteurs sont prêts à l’inviter à nouveau pour faire le point. Auparavant, elle est repartie avec du boudin apporté par le sénateur Jean-Claude Lenoir, et un poisson rouge baptisé Normandie qui nageait dans une eau fabriquée dans l’Orne. « Signe que notre eau est de qualité, » conclut Anne-Marie Denis.

ZNT : « reprenons l’arrêté de 2006 »
Le sujet alimente les discussions depuis plusieurs semaines. La FDSEA et les JA de l’Orne avaient saisi les parlementaires sur le sujet des ZNT (Zone non traitée), prévoyant l’utilisation des produits phytosanitaires à une distance de 20 m au lieu de 5 m des cours d’eau comme le prévoyait l’arrêté de 2006. Ce dernier a été suspendu par le Conseil d’Etat parce que la Commission européenne n’avait pas été consultée. Mais cette suspension est utilisée pour réécrire un nouvel arrêté qui n’est pas du goût des agriculteurs puisqu’il aurait un impact important sur la profession. D’une part, les bois, les haies, les tiers (maisons…) seraient aussi à prendre en compte. D’autre part, l’allongement de la distance aurait des conséquences « catastrophiques ». C’est 12 000 ha qui pourraient être impactés, surtout dans le Bocage et le Perche. « C’est une perte de 200 agriculteurs, la disparition de deux entreprises agroalimentaires et 1400 emplois » insiste la présidente de la FDSEA. « C’est extrêmement inquiétant » poursuit-elle. Alors, « reprenons l’arrêté de 2006 et continuons à discuter » répond la ministre. Une réponse qui se faisait attendre et qui réjouit la profession. Elle n’a plus qu’à être actée par le ministère le temps d’aboutir à un nouvel arrêté concerté.
Les zones défavorisées ont été aussi soulevées. Une nouvelle carte prévoit de supprimer de nombreuses zones de l’Orne sans raison évoquée. Ce qui interpelle notamment les JA. « On pouvait obtenir des aides complémentaires du fait de se situer dans ces zones. Aujourd’hui, cette nouvelle carte a des incidences sur les installations ,» martèle Damien Louvel, co-président des JA.

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